Stress et ménopause ne font pas bon ménage

Article paru sur le site web du Spa Eastman 9 août 2023

Le cortisol, l’une des principales hormones de stress, représente un allié indispensable à notre survie, toutefois, lorsque sécrété en continu, il s’avère un saboteur d’équilibre hormonal sans pitié!

Lorsque nous abordons l’univers hormonal, nous devons considérer une variété d’intervenant : les hormones thyroïdiennes, les estrogènes, la progestérone, la testostérone (oui la femme en a bien besoin!), l’insuline, la mélatonine mais aussi le cortisol!

Le cortisol est automatiquement sécrété lorsque nous faisons face à un ‘’stresseur’’. Comment définir ce dernier? Tout ce qui demande une adaptation physique, mentale, psychologique, émotionnelle, immunitaire ou métabolique et tous les éléments qui amènent le corps à devoir s’adapter à une nouvelle réalité, entrainent une demande de sécrétion en cortisol. Des exemples? La maladie, une diète appauvrie en nutriment, un manque de socialisation, le décès d’un être proche, les fluctuations glycémiques, pratiquer intensément un sport, le manque de sommeil … sans oublier : vivre un changement hormonal… comme lors de la périménopause! En effet, les grandes fluctuations hormonales qui caractérisent cette période sollicitent beaucoup d’adaptabilité! Celles qui traversent la périménopause peuvent en témoigner!

Les hormones, une communauté tissée serrée

Les hormones travaillent ensemble et forment une communauté tissée serrée. Elles sont, en effet, indissociables les unes des autres! Le corps étant un système fermé, une dérégulation d’une hormone provoque invariablement une répercussion sur une autre hormone.  Un effet domino s’enclenche automatiquement. Nos hormones s’opposent parfois, s’entraident souvent, mais s’autorégulent toujours! On ne peut donc pas aborder la santé hormonale en ne regardant qu’avec une lunette ‘’myopique’’! Il faut développer une vision large! Si l’on veut tendre vers un réel et permanent équilibre hormonal, il ne suffit pas d’ajouter de l’estrogène et de la progestérone à sa dosette! La pyramide du succès hormonal est plus complexe que cela! Comme nous le verrons, le mode de vie est le terreau à partir duquel peut émerger l’équilibre ou le déséquilibre hormonal!

Dosage et ratio

Dans le jargon hormonal, existent 2 grands déterminants : le dosage et le ratio. Il faut de tout, en dose adéquate pour optimiser les activités cellulaires mais aussi, il faut respecter un certain ratio entre les différentes hormones sans quoi une cascade de déséquilibre menacera la stabilité et le bien-être. Ceci est tout à fait approprié lorsqu’on aborde le facteur stress! Le cortisol, sécrété chroniquement, est un joueur impitoyable, il anéanti les autres hormones et remporte toujours la partie! Malheureusement, il induit des dommages. Cela débute souvent par des inconforts digestifs passagers, ensuite on peine à trouver le calme intérieur et une stabilité émotionnelle, le sommeil est affecté, la concentration décline ainsi que la mémoire, une hausse de poids s’installe autour de la taille, la libido disparait sous le tapis… Le constat : vivre sous tension finit par endommager… tout!

L’équilibre hormonal délaissé au profit de la survie

Pour bien comprendre, il faut revenir à des notions de base. Le cerveau humain répond à 2 programmes existentiels : d’abord survivre et ensuite reproduire l’espèce. La survie aura toujours préséance sur l’équilibre hormonal essentiel à la reproduction de l’espèce. Ceci signifie que sous stress (aka sous cortisol chronique), l’organisme priorisera ce qui est obligatoire aux besoins immédiats du corps et délaissera les systèmes requis pour la réparation des tissus, la digestion, la santé immunitaire et la sphère reproductive (aka équilibre hormonal). À retenir : l’incompatibilité entre la ménopause et une vie de stress! Vivre constamment en mode survie ne permettra jamais l’atteinte d’un réel équilibre hormonal!

Les glandes surrénales doivent être en santé

Pour traverser le plus harmonieusement possible cette période de changement, il faut compter sur des glandes surrénales tonifiées… et non épuisées. Pourquoi? C’est parce que le cortisol, issu de ces glandes, affecte la disponibilité d’une précieuse hormone nommée DHEA (dihydroépiandrostérone). Or, la DHEA représente LA bouée de sauvetage sur laquelle se fier pour traverser la périménopause entre le mur et la peinture! En effet, la DHEA est une hormone dite réservoir, signifiant qu’elle permet la création d’autres hormones lorsque les ovaires sont en perte de vitesse et donc remplit une fonction de relais hormonal permettant d’atténuer les fluctuations de celles-ci… et les symptômes apparentés. Lorsque le corps se trouve confronté à un facteur de stress, le cerveau sollicite les glandes surrénales, lesquelles produiront le cortisol… mais aussi la DHEA! Ceci signifie qu’une vie de stress (cortisol) finira par épuiser notre indispensable bouée de sauvetage! Yoyo hormonal droit devant! À propos, lorsque nous sommes accablées par une multitude de symptômes lors de la périménopause, le premier endroit où porter son attention et apporter ses soins, est sans équivoque, les glandes surrénales!

Mise à part la DHEA, la testostérone, l’estradiol, la progestérone, l’insuline et la fonction thyroïdienne représentent toutes des cibles hypothéquées par l’excès soutenu en cortisol. Par exemple, le cortisol et la progestérone entrent en compétition pour occuper les mêmes récepteurs à la surface des cellules. Or le cortisol, gagne toujours et empêche la progestérone de délivrer son message et apporter sa bienveillance! Le cortisol hausse la glycémie, ce qui affectera l’insuline et haussera conséquemment le tour de taille! Le cortisol inhibe la testostérone. Or la testostérone assure un mental d’acier! Le cortisol bloque également les fonctions thyroïdiennes de A à Z : de leur création, à leur transport dans le sang, en passant par leur activation et leur élimination! Ceci est l’une des raisons qui lie le stress chronique à la fatigue chronique et le brouillard mental!

Dominance estrogénique ne rime pas avec équilibre hormonal

Le cortisol renforce aussi la dominance estrogénique, soit un concept fréquemment rencontré lors de périménopause. C’est au médecin américain John Lee que nous devons ce terme. Il observa que le ratio entre les estrogènes et progestérone était inadéquat chez la majorité des femmes lors de cette période. La dominance en estrogène ne signifie pas un excès en estrogènes mais bien un déséquilibre dans le rapport entre ces derniers et la progestérone. La dominance estrogénique se cache sous un large éventail de symptômes communs tels que l’anxiété, l’irritabilité, la rétention d’eau, la compaction du tissu mammaire, le ballonnement, les fibromes, l’insomnie, le flot menstruel abondant et les cycles plus courts, entres autres. La dominance estrogénique est renforcit par le cortisol chronique, à différents niveaux. D’abord, le cortisol empêche la progestérone d’entrée dans l’arène pour faire une certaine opposition aux estrogènes. Ces derniers ont alors le champ libre pour influencer le métabolisme à leur guise. Le cortisol favorise également la prise de poids abdominal. En effet, les cellules adipeuses (grasses) situées sur l’abdomen présentent 4 fois plus de récepteurs à cortisol que toutes autres cellules adipeuses du corps! Donc, plus de cortisol se traduit par une stimulation des cellules abdominales qui, à leur tour, activent une précieuse enzyme nommée aromatase. L’aromatase permet la synthèse d’estrogènes. Eh oui, le tissu adipeux abdominal est un organe producteur d’hormones féminines! Ceci est la raison principale qui explique la prise de poids lors de la périménopause, en assurant, ici aussi, un certain relais hormonal. Mais trop, c’est comme pas assez! Le cortisol représente l’huile sur le feu : il favorise la multiplication des cellules adipeuses qui, à leur tour hausseront la production d’estrogènes, ce qui se traduira par une dominance estrogénique encore plus affirmée. Dominance estrogénique ne rime pas avec équilibre hormonal! Le stress agit ainsi comme amplificateur de symptômes!

La clé? Un mode de vie sain

En définitive, le cortisol doit demeurer dans ses quartiers! Intervenir lors de stress majeur mais ne pas être sollicité ad nauseum! Pour maintenir un équilibre hormonal, le stress doit être une crise de courte durée! Sans quoi, la facture est trop chèrement payée, particulièrement lors de périménopause. À préciser : la prise d’hormones exogènes (aka estrogel et prométrium) ne règlera pas ce type de déséquilibre! La clef se cache donc dans le mode de vie!

Pour atténuer les impacts du stress chronique (cortisol), multiples options sont à considérer :

•  La vitamine C améliore le profil en accélérant l’élimination du cortisol suite d’un stress;
• Le magnésium agit à titre de cofacteur pour assurer la synthèse et libération du gaba, soit un neurotransmetteur inhibiteur du système nerveux. Le gaba favorise la zénitude et le calme intérieur;
• Les acides gras oméga-3 réduisent légèrement la libération de cortisol influencée par le stress mental. Ils agissent en réduisant la libération de la commande cérébrale (CRH/ACTH) dont la fonction est de stimuler les glandes surrénales à produire le cortisol. Les omégas-6 tiennent un rôle inverse;
• Tout ce qui contribue à l’état de relaxation : yoga, méditation, musicothérapie, massage;
• Les activités plaisantes comme le rire et la danse réduisent les niveaux de cortisol (1, 2);
• Un supplément de phosphatidylsérine interagit positivement sur les récepteurs à cortisol de l’hypothalamus et en assure la protection. Ce type de phospholipides accélère la réparation des dommages cérébraux induits par une surexposition au stress (3,4);
• Les plantes adaptogènes assistent les glandes surrénales dans leur réponse au stress. Ces plantes permettent au corps de répondre de façon équilibrée, pas plus que requis et ménagent ainsi nos surrénales! L’ashwagandha, le rhodiola, l’éleuthérocoque, le schisandra, le ginseng américain et asiatique en sont des exemples (5);
• Le meilleur antidote demeure l’activité physique, pratiquée de façon régulière, à intensité moyenne, à raison de 30 minutes, cinq jours par semaine.

Pour être autonome en matière de santé hormonale

Pour atteindre la plénitude hormonale, c’est tout d’abord le mode de vie qu’il faut analyser! À défaut d’adresser, en priorité, nos facteurs de stress, rien ne s’équilibrera définitivement en vous!

Retraite à venir

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Références :

  1. Berk LS, Tan SA, Berk D (2008). « Cortisol and Catecholamine stress hormone decrease is associated with the behavior of perceptual anticipation of mirthful laughter ». The FASEB Journal. 22 (1): 946.11.
  2. Quiroga MC, Bongard S, Kreutz G (July 2009). « Emotional and Neurohumoral Responses to Dancing Tango Argentino: The Effects of Music and Partner ». Music and Medicine. 1 (1): 14–21. 
  3. Hellhammer J, Fries E, Buss C, Engert V, Tuch A, Rutenberg D, Hellhammer D (June 2004). « Effects of soy lecithin phosphatidic acid and phosphatidylserine complex (PAS) on the endocrine and psychological responses to mental stress ». Stress. 7 (2): 119–26. 
  4. Starks MA, Starks SL, Kingsley M, Purpura M, Jäger R (July 2008). « The effects of phosphatidylserine on endocrine response to moderate intensity exercise ». Journal of the International Society of Sports Nutrition. 5: 11. 
  5. Chandrasekhar K, Kapoor J, Anishetty S (July 2012). « A prospective, randomized double-blind, placebo-controlled study of safety and efficacy of a high-concentration full-spectrum extract of ashwagandha root in reducing stress and anxiety in adults »

L’autre préménopause : Identifier et reconnaitre les symptômes moins communs de cette période

Article paru dans revue Vitalité Québec, mai 2021

Cycles irréguliers et anovulatoires, prise de poids, bouffées de chaleurs et insomnie sont les signes communs qui ne surprennent personne lorsqu’une femme avance vers sa ménopause. Ces symptômes représentent des bons indicateurs que l’horloge biologique se transforme et que le potentiel fertile s’amenuise. En revanche, ‘’l’autre préménopause’’ se réfère à un ensemble de signes physiologiques tout aussi important mais qui passe sous le radar du changement hormonal, et pourtant! En effet, plusieurs femmes expérimentent des inconforts divers, qui, à première vue ne laissent aucunement présager à une relation hormonale, puisqu’étrangement, le cycle menstruel demeure habituellement inchangé.

La préménopause se réfère à la période de transition précédant la ménopause au cours de laquelle les taux d’hormones progestérone et estrogènes, diminuent progressivement.  Le remaniement hormonal débute sournoisement dans la trentaine pour s’intensifier avec les années. Ce déséquilibre hormonal induit des symptômes désagréables variés, parfois étranges, particulièrement notables dans la quarantaine et la cinquantaine. Explorons quelques-uns de ces symptômes moins familiers mais tout à fait communs.

Céphalée et migraine

Les modifications hormonales influencent la prépondérance féminine à la céphalée et à la migraine. En effet, près des deux tiers des personnes migraineuses ont des déclencheurs hormonaux et les probabilités augmentent de 50% lorsque les niveaux d’estrogènes, et conséquemment de progestérone, sont faibles (1). Puisque ces deux hormones majeures diminuent progressivement durant la préménopause, une hausse proportionnelle des maux de tête, pouvant atteindre de 25 à 30%, est ressentie chez les femmes à partir de 35 à 40 ans (2).

Lorsque les niveaux d’estrogène et de progestérone diminuent, nous assistons à un remaniement neuroendocrinien global. Ces hormones ont, toutes deux, une action importante sur les récepteurs sérotoninergiques centraux et sur les récepteurs opiacés impliquées dans la sensation de douleur. Toutefois la chute de l’estradiol semble être le mécanisme principal de la migraine hormonale (3,4).

Estrogène et sérotonine : La sérotonine est le principal neurotransmetteur responsable de l’attitude positive, mais là ne se limite pas son rôle. La sérotonine affecte également le dynamisme des vaisseaux sanguins (dilatation et vasoconstriction), la viscosité sanguine, la perception de la douleur via le nerf trijumeaux et les noyaux du raphé ainsi que la réponse neuroendocrinienne de l’hypothalamus, soit la majorité des causes officielles liées à la migraine. L’implication de la sérotonine est bien définie, d’où la pertinence des médicaments appartenant à la catégorie des triptans (agonistes de récepteurs à sérotonine), reconnus comme traitement efficace des migraines.  Chez la femme, la perception de la douleur varie en fonction des phases du cycle menstruel (7). En effet, l’estrogène est reconnu pour augmenter la densité des récepteurs de sérotonine ce qui influence directement le transport de celle-ci dans le cerveau. Ceci signifie qu’en réduction d’estrogène, la participation de la sérotonine sera également diminuée et la susceptibilité aux céphalées augmentée. Le relation estrogènes et sérotonine est aussi celle qui détermine la sévérité du syndrome prémenstruel (5), dont les changements d’humeur et les fringales sucrés (par leur apport en tryptophane, le précurseur de sérotonine) que plusieurs femmes connaissent ! Ceci laisse sous-entendre que la vitesse des changements hormonaux pendant la préménopause pourrait représenter un élément prédictif pour le développement des céphalées, en particulier chez les femmes ayant des antécédents de syndrome prémenstruel important au cours de leur période reproductive (6).

Estrogène et opiacés : Les récepteurs opiacés sont directement impliqués dans la sensation de douleur. Parmi les neurotransmetteurs antalgiques appartenant à cette famille nous retrouvons les endorphines. Or, l’estrogène favorise leur synthèse, ce qui se traduit par une inhibition de la perception douloureuse. Lorsque les concentrations d’estrogènes diminuent et conséquemment celle des endorphines.

‘Toute douleur est perçue comme plus intense et particulièrement dans le cas d’une migraine menstruelle’’ – Dr Calhoun, neurologue (1).’

Douleurs articulaires

Les hormones de reproduction travaillent de concert pour assurer la santé articulaire. Pas étonnant que l’augmentation des rhumatismes et des douleurs arthritiques concordent avec la chute de celles-ci et qu’elle s’accentue partir de la préménopause. En effet, l’estrogène et la progestérone agissent en modulant l’inflammation à la baisse. Les douleurs et la perte de souplesse s’installent progressivement, en suivant les fluctuations hormonales durant le cycle. Cette réalité est vécue par plus de la moitié des femmes lors de la préménopause (8).  Gonflement articulaire, raideur au réveil, perte de mobilité transitoire, douleur lancinante dans les doigts, et dans la nuque sont des exemples communément associés aux changements hormonaux. L’hormonothérapie substitutive représente, à cet égard, une mesure conservatrice et efficace pour adresser ce syndrome inconfortable (9). D’ailleurs, les arthralgies surviennent fréquemment après l’arrêt soudain de celle-ci, lors d’un traitement anti-estrogénique suivant un cancer hormonodépendant et suite à une hystérectomie, puisque ces trois conditions provoquent une chute marquée des estrogènes circulants. 

Les estrogènes ne sont pas seulement anti-inflammatoires et modulateurs de la douleur mais aussi favorisent la mort des chondrocytes endommagées (les cellules responsables de fabriquer le collagène) et ainsi maintenir l’intégrité du cartilage, soit le tissu de soutien retrouvé sur les articulations et au niveau osseux (10). Les chondrocytes sont des cellules sensibles à l’inflammation et aux désordres hormonaux. En fait, elles possèdent des récepteurs à estrogène à leur surface (11). Lors d’une raréfaction en estrogènes, le renouvellement des chondrocytes est ralenti, ce qui favorise la dégradation du cartilage et conséquemment de l’os. Plusieurs modèles animaux ont confirmé l’importance de l’estrogène en utilisant des marqueurs biochimiques de la dégradation articulaire. Ils ont démontré une inhibition d’environ 50% de la destruction du cartilage lorsque l’estrogène est disponible (12). Chez les femmes vivant avec une polyarthrite rhumatoïde, on note d’ailleurs un soulagement de la douleur lorsque l’estrogène est plus élevé (autour de l’ovulation) au cours du cycle menstruel (13, 14, 15).

Palpitations cardiaques

Les fluctuations hormonales peuvent également entraîner des modifications du rythme cardiaque. Ceci est souvent plus notable le soir, une fois allongée et détendue mais peut survenir à tout moment du jour également. Le cœur s’emballe sans pourtant qu’on ressente de la nervosité. Les palpitations occasionnelles et temporaires font possiblement partie de l’expérience de transition et se manifeste couramment en préménopause. Les palpitations cardiaques peuvent augmenter la fréquence cardiaque de 8 à 16 battements en moyenne par minute. Alors que la préménopause peut commencer 8 à 10 ans avant la ménopause, c’est surtout au cours des dernières années de cette transition, que la baisse des estrogènes s’accélère significativement et influence la tendance aux palpitations et aux arythmies non menaçantes. La baisse en estrogènes est connue pour entrainer une surstimulation cardiaque. Toutefois, il est suggéré de consulter un médecin pour s’assurer que ces manifestations sont effectivement inoffensives!

 

De récentes recherches montrent que les palpitations sont un problème pénible pour environ 25% des femmes pendant la phase de transition hormonale qu’est la préménopause. La prévalence pour une femme de signaler une détresse due aux palpitations est plus élevées chez celles souffrant d’insomnie, de dépression et de stress. Dans ce sous-groupe, près de 34% ont signalé des épisodes de palpitations cardiaques (16). Puisque plusieurs symptômes hormonaux se produisent en raison de changements dans le système nerveux, tel que l’insomnie, les bouffées de chaleur et les douleurs articulaires, il serait possible que les palpitations s’expliquent ainsi (17).

Énergie et intérêt : faible tolérance à l’effort physique et mental

Avec la diminution des hormones sexuelles, plusieurs femmes ressentent un brouillard cérébral, une perte de clarté mentale, des difficultés de concentration et de mémoire. Ceci n’est pas surprenant puisque l’estrogène, comme modulateur de plusieurs neurotransmetteurs, influence la fonction exécutive et la vitesse de traitement de l’information par le cerveau. Ceci est bien répertorié comme symptôme lié à la chute des hormones, mais explorons une autre facette moins connue, celle de la dopamine.

La dopamine est l’un des neurotransmetteurs sensibles au taux d’estrogène circulant. Elle contrôle l’activité musculaire et module notre niveau d’attention et de motivation.

Ceci explique pourquoi les femmes ont des capacités cognitives et athlétiques variables selon différents moments de leurs cycles menstruels. Les scientifiques savent depuis des décennies que la mémoire de travail (traitement de l’information à court terme) dépend de la dopamine. Il y a quelques années, une équipe de neuroscientifiques de l’Université de Californie à Berkeley ont exploré comment les fluctuations hormonales au cours du cycle menstruel d’une femme pouvaient affecter le cerveau. Ils ont constaté que la dopamine agissait aussi puissamment que la caféine, les méthamphétamines ou le médicament Ritalin. En effet, les femmes qui avaient une production faible d’estrogène, et conséquemment en dopamine, ont eu plus de mal à effectuer les tâches proposées. Ceci est venu confirmer la relation entre l’estrogène et la libération de dopamine. Ce constat serait uniquement observé chez les femmes et non les hommes. Cela peut signifier également que la caféine, qui déclenche une libération de dopamine, comme les médicaments de type Ritalin sont moins efficaces à certains moments du mois chez certaines femmes (18).

 

L’estrogène module assurément le comportement par son impact sur la dopamine. Reconnue comme la molécule principale du plaisir et de la satisfaction, plusieurs femmes ressentent une baisse de motivation lors de la préménopause. Ceci se traduit par un désintérêt variable et une baisse d’initiative. Plus la chute hormonale est marquée, plus la dopamine sera affectée et plus l’enthousiasme sera maigre. La préménopause peut ainsi devenir une période perturbante et même prendre l’ampleur d’une crise psychique majeure pour certaines femmes.

L’hormonothérapie bio-identique substitutive

Le coffre à outils est large et les possibilités sont généreuses. L’accès à l’hormonothérapie bio-identique substitutive représente sans hésitation l’option la plus directe. Votre médecin doit cependant offrir un encadrement responsable. Ceci signifie que le dosage devra être ajusté en fonction des bilans cliniques mais aussi, et surtout, des symptômes. Il faut du doigté pour manipuler efficacement et sécuritairement le profil hormonal d’une personne. L’optimisation hormonale est une spécialité clinique avec laquelle encore trop peu de médecin sont réellement à l’aise. Cependant, lorsque l’hormonothérapie bio-identique substitutive est bien utilisée, le bonheur est au coin de la rue pour la grande majorité des consommatrices.

La naturopathie et les plantes médicinales

Pour les femmes qui préfèrent moduler leur statut hormonal sans ajout extérieur d’hormones, des solutions autres existent. La naturopathie offre une multitude d’options ayant démontré des effets probants, évalués en clinique ou en regard d’observation épidémiologique. Parmi elles, certaines plantes médicinales comme le vitex, l’actée à grappes noires, la rhubarbe chinoise, l’agripaume cardiaque ou des extraits standardisés et homologués comme les isoflavones de soya représentent une bouée de sauvetage bien appréciée permettant de supporter globalement cette phase de perturbations.

La grande camomille, la pétasite et le romarin, pour ne nommer que ces plantes, sont légendes pour atténuer les maux de tête et la migraine. Elles apporteront un soulagement et ainsi contribuer à réduire la sévérité des céphalées. L’ajout de collagène en poudre participe à soutenir le renouvellement des articulations et ainsi réduire les douleurs associées. Facile à intégrer à son quotidien, une ou deux doses suffisent pour se sentir soulagée et maintenir une belle souplesse. Le magnésium, l’aupépine, le Coenzyme Q10 et le Gaba sont des pistes de solutions qui permettent à plusieurs utilisatrices d’atténuer les inconforts liés aux palpitations tout en soutenant le système nerveux et la qualité du sommeil. L’acide aminé tyrosine, le pois mascate, l’activité physique et prendre une douche froide peuvent également soutenir la synthèse de dopamine et ainsi atténuer les symptômes reliés à sa baisse.

La préménopause transforme la vie pour l’ensemble des femmes

Comme il est permis de constater, les hormones sexuelles influencent la santé des femmes bien au-delà de la sphère reproductive. La préménopause est un passage obligé qui transforme profondément la vie pour l’ensemble des femmes. Les signes cliniques et symptômes diffèrent d’une personne à l’autre. Certains, bien répertoriés, comme les changements dans le cycle menstruel et les bouffées de chaleur, nous indiquent sans équivoque l’arrivée de cette période transitoire. Cependant, plusieurs autres manifestations sournoises et moins caractérisées affectent la qualité de vie et ne sont pas d’office interprétées en regard des fluctuations hormonales qui s’intensifient. Elles débutent parfois des années avant l’évidence de la ménopause. La préménopause est un processus évolutif qui débute plus tôt pour certaines femmes que d’autres. Ne tombez pas dans le piège; l’âge ne représente pas un déterminant infaillible. Dès la mi-trentaine, avec une hausse progressive à partir de la mi-quarantaine, chaque femme s’expose graduellement aux répercussions du remaniement hormonal.

Identifier et reconnaitre que ces symptômes sont normaux et surtout transitoires permet de réduire leur caractère anxiogène.

Références:

  1. Calhoun A, Ford S. Elimination of menstrual-related migraine beneficially impacts chronification and medication overuse. Headache. 2008;48(8):1186-1193;
  2. Low estrogene levels trigger menstrual migraine, Neurology Review, 2009 may 17;
  3. B. Nater, J. Bougousslavsky, Migraine et hormones. Rev Med Suisse 2002, volume 2;
  4. B W Somerville, The role of progesterone in menstrual migraine, Neurology, 1971 Aug;21(8):853-9;
  5. Rémy C. Martin-Du-Pan. Syndrome prémenstruel, envie de sucre et sérotonine. Rev Med Suisse 2010; volume 6. 1517-1517;
  6. Faubion S, Batur P, Calhoun AH. Migraine Throughout the Female Reproductive Life CycleMayo Clinic Proceedings. 2018 May;93(5):639–645;
  7. International Association for the Study of Pain, September 2007. www.iasp­pain.org;
  8. Magliano M. Menopausal arthralgia: Fact or fiction. Maturitas. 2010 Sep 1;67(1):29-33; 
  9. Rowan T Chlebowski,  Dominic J Cirillo et al. Estrogen alone and joint symptoms in the Women’s Health Initiative randomized trial, Menopause, 2018 Nov;25(11):1313-1320;
  10. Reena M TalwarB, rendan S Wong et al. Effects of estrogen on chondrocyte proliferation and collagen synthesis in skeletally mature articular cartilage, J Oral Maxillofac Surg, 2006 Apr;64(4):600-9;
  11. Anita Breu , Benedikt Sprinzing et al. Estrogen reduces cellular aging in human mesenchymal stem cells and chondrocytes, J Orthop Res, 2011 Oct;29(10):1563-71;
  12. M A KarsdalA C Bay-JensenK HenriksenC Christiansen, The pathogenesis of osteoarthritis involves bone, cartilage and synovial inflammation: may estrogen be a magic bullet? Menopause Int, 2012 Dec;18(4):139-46;
  13. J E McDonaghM M SinghI D Griffiths. Menstrual arthritis. Ann Rheum Dis, 1993;
  14. N S Latman, Relation of menstrual cycle phase to symptoms of rheumatoid arthritis, Am J Med, 1983 Jun;74(6):957-60;
  15. Rowan T. ChlebowskiDominic J. Cirillo et al. Estrogen Alone and Joint Symptoms in the Women’s Health Initiative Randomized Trial, Menopause. 2013 Jun;
  16. Jenet Carpenter, PhD, distinguished professor, Audrey Geisel Endowed Chair in Innovation, associate dean of research, Indiana University School of Nursing, Indianapolis;
  17. Stephanie Faubion, MD, medical director, North American Menopause Society, and director, Center for Women’s Health, Mayo Clinic, Rochester, Minn.; Journal of Women’s Health, Nov. 20, 2020, online;
  18. Jacobs, Emily Christine, Estrogen shapes dopamine-dependent cognitive processes: Implications for women’s health. Berkeley, University of California, 2010.

Progestérone, bien plus qu’une affaire d’utérus!

Article paru dans revue Vitalité Québec janvier 2021 et février 2021

Malheureusement, encore aujourd’hui, plusieurs femmes ménopausées ayant subies une hystérectomie se voit refuser l’accès à la progestérone par leur médecin prétextant que cette hormone n’a d’utilité qu’en regard de l’utérus. Pourtant, l’accumulation de données démontre que les actions physiologiques de cette hormone s’étendent à plusieurs fonctions non reproductives. En effet, un éventail organes expriment des récepteurs à progestérone: thyroïde, système nerveux, vaisseaux sanguins, sein, tissu osseux, muscles et ligaments, vessie, peau, foie, pancréas, intestins et autres, laissant présager qu’elle y exerce une certaine influence. La progestérone ne reçoit pas encore l’attention qu’elle mérite et sa contribution à la santé est largement sous-estimée. S’il est vrai que les principaux organes producteurs sont les ovaires et que le rôle premier de cette hormone est tout d’abord de moduler l’utérus pour une éventuelle grossesse, cela ne signifie pas pour autant que la progestérone n’a plus d’importance une fois en ménopause, au contraire!

L’équilibre hormonal, cette quête si chère à la santé des femmes, n’est possible qu’en harmonisant (minimalement) les estrogènes et la progestérone. La santé hormonale implique un partenariat et ne s’entrevoit pas en l’absence de l’une ou l’autre. Ce n’est pas un hasard si les récepteurs de l’une et l’autre se retrouvent dans les mêmes tissus. En effet, la progestérone est essentielle à l’activation des récepteurs d’estrogènes et ces dernières permettent la création de récepteurs à progestérone. Ces précieuses hormones s’entraident et se contrebalancent dans leurs actions, il faut donc la présence des deux pour obtenir une réponse hormonale équilibrée. Ceci nous amène à penser que l’ensemble des tissus du corps ont besoin d’être exposés aux deux hormones pour optimiser leur rendement.

La progestérone et le cerveau

La progestérone est fabriquée majoritairement par les ovaires et le placenta lors de grossesse, mais le cerveau représente également un site de production de cette hormone. En fait, les cellules nerveuses sont exposées à la fois à la progestérone issue des organes reproducteurs (compte tenu de sa structure lipophile) mais aussi à celle qu’elles fabriquent elles-mêmes. Pourquoi autant d’option? Parce que cette hormone est essentielle au développement et au maintien des fonctions de ce tissu! Des études animales ont montré que la progestérone peut augmenter la croissance de nouvelles cellules dans le cerveau en activant l’expression des gènes qui favorisent la division cellulaire et inhiber ceux qui la répriment. La progestérone participe ainsi à la genèse des cellules nerveuses (neurones et cellules gliales), à la protection du cerveau contre les agressions et les traumatismes, à la régénération des fibres nerveuses endommagées, à la myélinisation (couche protectrice recouvrant les nerfs responsables de la transmission du signal électrique), à la reconfiguration des connexions neuronales impliquées dans l’apprentissage et la mémoire, en plus d’influencer l’humeur (1).

Seule la progestérone peut être convertie en alloprégnanolone, soit un métabolite ayant des effets anxiolytiques, anti-dépresseurs, prosocial, sédatifs, analgésiques et même neuroprotecteurs(2-4). C’est par son affinité avec les récepteurs GABA-A du cerveau que l’alloprégnanolone infuse la détente, la sérénité et une humeur stable (5) tout en favorisant un sommeil récupérateur… tout ce qu’il faut pour apaiser un syndrome prémenstruel, une phase d’irritabilité ou une insomnie hormonale! D’ailleurs l’allogrénanolone (sous le nom Brexanolone) est approuvée depuis 2019 aux États-Unis pour le traitement de la dépression postpartum.(6,7)

La progestérone influence positivement la santé neurologique et ceci est d’autant plus important pour un cerveau vieillissant. Il y a une diminution naturelle du renouvellement cellulaire avec l’âge et puisque la progestérone semble favoriser la croissance des cellules cérébrales et améliorer les performances cognitives chez les rongeurs, il s’agit d’une nouvelle prometteuse pour le cerveau vieillissant des humains. D’ailleurs, la progestérone serait capable d’inverser les déficits cognitifs liés à la maladie d’Alzheimer(8,9) et ralentir les conditions neurodégénératives telles que la sclérose en plaque (10). Alors pourquoi s’en priver?

La progestérone et la thyroïde

La santé des individus est en grande partie définie par le rendement de la thyroïde. Cette dernière représente une glande indispensable au métabolisme de tous les organes.  Son influence est générale, allant de l’activation des gènes, l’utilisation de l’oxygène dans les cellules, le renouvellement osseux, sans oublier les fonctions digestives, cardiaques, nerveuses, reproductives et la liste continue!

Les dysfonctions thyroïdiennes ne sont pas rares et la progestérone, vous l’aurez deviné, facilite l’action de cette glande. La recherche montre que la progestérone peut augmenter les taux d’hormones thyroïdiennes dans le sang en plus de réduire la quantité de protéine de liaison pour ces hormones, ce qui signifie que plus d’hormones demeurent disponibles pour exercer leurs fonctions sur les tissus cibles (11) de l’organisme.

La progestérone exerce une action compétitive avec l’estrogène

L’estrogène est connu pour interférer avec les hormones thyroïdiennes dans la glande elle-même et en périphérie. Ceci se traduit par une quantité de symptômes dont la prise de poids et la fatigue. Lorsque le niveau de progestérone est faible, les estrogènes ont donc le champ libre pour ralentir le métabolisme. Lorsqu’une quantité suffisante de progestérone est en circulation dans le corps, les hormones thyroïdiennes accélère le rendement cellulaire et utilise la graisse stockée sous l’influence des œstrogènes et entraine un regain d’énergie (12). Parmi les stratégies pour normaliser la thyroïde, l’équilibre entre estrogènes et progestérone est de mise. Ceci est d’autant plus important lors de préménopause où les cycles menstruels sont souvent anovulatoires, ou absents à partir de la ménopause (sans production de progestérone dans les deux cas).

Le déficit en progestérone serait lié au déficit en calcitonine. La calcitonine est une autre hormone issue de la thyroïde qui favorise la minéralisation du corps en abaissant le taux de calcium dans le sang pour en favoriser l’incorporation dans les os et les dents. La calcitonine, assistée de la progestérone, permet ainsi le remaniement osseux si précieux lors de la ménopause alors que l’ostéoporose évolue progressivement.

La progestérone et la santé osseuse

Comme nous venons de le voir, la progestérone favorise le dépôt minéral dans l’os. Ceci est possible, non seulement via la calcitonine mais aussi par son action stimulatrice sur les ostéoblastes, soit les cellules responsables du renouvellement du tissu osseux. D’ailleurs, on note une augmentation de l’activité ostéoblastique lors de la phase lutéale du cycle menstruel, soit la phase suivant l’ovulation, lorsque les niveaux de progestérone atteignent leur maximum. Le rôle de la progestérone semble assez significatif pour que plusieurs chercheurs affirment que l’ostéoporose post-ménopausique est, en partie, une maladie de carence en progestérone (13).

La progestérone et la santé du cœur

Sur ce point, la confusion est totale! Dans la littérature on retrouve un amalgame d’informations concernant les progestines synthétiques qui, bien qu’ils n’aient pas la même structure moléculaire de la progestérone, passent aux yeux de la médecine pour des équivalents. Or, grave erreur car si toutes les progestines ont par définition une activité progestative, ils ont également une gamme divergente d’autres propriétés qui peuvent se traduire par des effets cliniques très différents de la progestérone naturelle. Par exemple, l’acétate de médroxyprogestérone (progestine synthétique nommée AMP) augmente les risques d’accidents vasculaires, hausse le niveau de la protéine C réactive, favorise la prolifération des cellules musculaires lisses dans les artères, contribue à la formation de caillots sanguins, soient tous des indicateurs favorables aux maladies cardiovasculaires, alors que les preuves, de plus en plus nombreuses, démontrent exactement le contraire pour ce qui est de la progestérone naturelle (14). Cette usurpation d’identité retient plusieurs médecins à prescrire la progestérone à leurs patientes présentant des facteurs de risques de maladie cardiovasculaire de par la mauvaise presse qu’on lui attribue, bien malgré elle.

Lors d’une étude menée sur plusieurs femmes appliquant quotidiennement 20mg de progestérone sous forme de crème sur une période de 4 semaines, aucune élévation de l’un des marqueurs thrombotiques ou inflammatoires étudiés (protéine C, facteurs V, VII, VIIII, fibrinogène, antithrombine, PAI-1, protéine C réactive, TNFα, IL-6) n’a été observée, comparativement aux études antérieures impliquant des progestines synthétiques (15,16). Parmi les facteurs améliorés par la progestérone naturelle (application transdermique), nous retrouvons une action régulatrice sur la fluidité sanguine et la vasodilatation, tenant un rôle préventif sur les embolies veineuses, l’ischémie cardiaque et l’angine de poitrine. La progestérone est, de plus, antispasmodique et diurétique. Par son effet inhibiteur sur l’aldostérone, la progestérone réduit l’absorption de sodium et d’eau. Elle limite ainsi les œdèmes que beaucoup de femmes connaissent à l’approche des règles, surtout en préménopause. La rétention de liquide est un facteur de nuisance pour la santé cardiovasculaire puisqu’elle peut induire une hypertension et aggraver une insuffisance cardiaque (17). La progestérone naturelle permet également d’améliorer le profil des lipides sanguins en faveur du cholestérol HDL (dit ‘’le bon’’) (18), ralentissant, de facto, le développement d’athérosclérose.

Puisque les maladies cardiovasculaires sont depuis longtemps reconnues comme la première cause de décès chez les femmes, dont le risque augmente considérablement après la ménopause et que la ménopause annonce l’apparition de faibles taux de cholestérol HDL comparativement aux autres lipides sanguins, toute intervention sécuritaire permettant le renforcement de la fonction cardiovasculaire ne doit pas être écarté, dont l’équilibre hormonal!

La progestérone et les seins

Avec l’augmentation presqu’épidémique de cancer du sein, s’il y a un tissu pour lequel plusieurs femmes s’inquiètent c’est bien celui mammaire! Tout ce qui permet de le protéger revêt d’office une aura hautement précieuse! Vous ne serez pas surpris d’apprendre que la progestérone naturelle est favorable à la santé de ce tissu.

La progestérone prévient la prolifération excessive des cellules dans le tissu mammaire

En effet, une stimulation estrogénique non compensée par la progestérone favoriserait les maladies des seins dont la formation kystique, l’enflure qui accompagne le cycle menstruel et le cancer. Selon les résultats d’une méta-analyse portant sur 86 881 femmes ménopausées, on rapporte que l’utilisation de progestérone naturelle est associée à un risque significativement plus faible de cancer du sein par rapport aux progestatifs synthétiques. L’absence d’ovulation et de faibles taux de progestérone sérique ont été associés à un risque significativement plus élevé de cancer du sein chez les femmes pré-ménopausées. L’utilisation de progestérone naturelle est également liée à des taux plus faibles de cancers de l’utérus et du côlon et peut également être utile dans le traitement d’autres cancers tels que l’ovaire, le mélanome, le mésothéliome, la prostate et la thyroïde. (19-22)

De plus, une carence en progestérone contribuerait à augmenter le nombre de récepteurs de facteurs de croissance tumorale et représenterait un facteur de risque lié au cancer du sein. (23) Nous savons également que la progestérone naturelle régule à la baisse la formation des métalloprotéinases, soient des enzymes requises par les cellules cancéreuses afin de renforcer leur capacité d’invasion. (24-26)

La majorité des cancers du sein contiennent à la fois des récepteurs d’estrogènes et de progestérone (appelés tumeurs ER positives / PR positives ou cancer hormono-dépendant). Ce type de cancer obtient de meilleur résultat de traitement. Que sont les récepteurs des œstrogènes et de la progestérone et que font-ils exactement? C’est une équipe scientifique affiliée au UK Cancer Research et de l’Université d’Adélaïde en Australie qui a fait la lumière sur ce point majeur. (27)

Les récepteurs hormonaux sont des facteurs de transcription, ce qui signifie qu’ils sont tous deux impliqués dans l’activation et la désactivation des gènes dans les cellules. Ils représentent le mécanisme qui permet aux œstrogènes et à la progestérone de modifier le comportement de nos cellules. Les cellules cancéreuses du sein ont une sensibilité accrue aux estrogènes. Une fois que l’estrogène se lie à son récepteur à la surface des cellules, ce dernier s’active et pénètre dans la cellule et dans le noyau, où il se fixe à des régions spécifiques de l’ADN. Cette fixation active la transcription d’un groupe de gènes (dont le Bcl-2) qui favorisent la division cellulaire et donc, potentiellement, la croissance tumorale mais aussi désactive d’autres gènes impliqués, en autres, dans la mort des cellules. Cette reprogrammation est au cœur du processus tumoral et de son traitement par des modulateurs hormonaux tels que Tamoxifène, Femara, Arimidex et Zoladex.

Les récepteurs à progestérone ont, de leur côté, une action étonnante. Lorsqu’ils sont activés par cette hormone, ils se fixent directement sur les récepteurs des estrogènes et inhibent l’activation des gènes qui favorisent la croissance des cellules en plus d’activer des gènes (dont la p53) qui favorisent la mort des cellules cancéreuses (apoptose) et la croissance de cellules saines et normales! (28) Les chercheurs ont découvert que le récepteur de l’estrogène se liait à différentes régions de l’ADN selon que la progestérone était ou non présente, et conclus que la participation de la progestérone est cruciale pour assurer un encadrement sécuritaire.

Ce même constat a été observé chez des souris exprimant un cancer hormono-dépendant. L’équipe de recherche a constaté que les tumeurs chez les souris qui ne recevaient que des estrogènes se développaient, comparativement à une diminution de taille des tumeurs des souris qui recevaient à la fois des estrogènes et de la progestérone. De là leur est venu l’idée d’exposer les tumeurs à une combinaison de Tamoxifène et de progestérone naturelle, et ont remarqué une diminution marquée de la croissance tumorale comparativement aux tumeurs traitées seulement au Tamoxifène. (29)

La progestérone permettrait deux choses. Premièrement, elle peut empêcher les cellules saines du tissu mammaire de muter en tumeur. Deuxièmement, elle peut limiter la croissance des tumeurs mammaires existantes ou même les réduire en taille. Ces avantages sont exclusivement liés à la progestérone naturelle et non aux progestines synthétiques qui augmentent, plutôt que réduisent, les risques de cancer du sein. Ainsi, on peut conclure que si les femmes ont des taux de progestérone sains, grâce à une supplémentation naturelle en progestérone, elles pourraient considérablement améliorer les résultats de leur traitement.

Progestérone et système reproducteur

La progestérone agit fortement sur l’utérus : il permet la mise en place d’un environnement favorable à la reproduction. Sa contribution à la fertilité est bien documentée et la grossesse ne s’entrevoit pas en absence de cette hormone. Elle est d’ailleurs utilisée régulièrement dans les centres de procréation assistée. La preuve la plus flagrante qui confirme la différence entre les progestines et la progestérone naturelle réside dans le fait que l’on prescrit fréquemment de la progestérone pour maintenir la grossesse et réduire les risques de fausses-couches, alors que les progestines sont, pour leur part, absolument contre-indiqués car elles nuisent à la fécondation en épaississant la glaire cervicale, elle est de plus dangereuses pour le fœtus! (30, 31). Malgré ces divergences d’action, plusieurs médecins et chercheurs continuent de croire que progestérone et progestines artificielles sont synonymes!

Plus la femme avance dans la trentaine et la quarantaine, plus elle ressent les fluctuations hormonales qui se caractérisent par une diminution des cycles ovulatoires et conséquemment de progestérone. Une condition nommée insuffisance lutéale est rencontrée fréquemment en préménopause. Elle signifie que le corps jaune ne produit pas assez de progestérone, malgré une ovulation normale. Il est possible aussi d’avoir des cycles anovulatoires par manque de développement du corps jaune, là où se loge l’ovule. Ceci est sans oublier les femmes consommatrices d’anovulants qui ne jouissent pas des avantages de la progestérone tout au long de leur contraception.

Qu’est-ce que la dominance estrogénique?

Comment se traduit une déficience en progestérone? Par une dominance en estrogène. C’est au Dr. John Lee que nous devons ce concept. Il est le premier à avoir mentionné que lors de la péri-ménopause, malgré une baisse dans la production globale d’hormones, l’organisme demeurait, dans la majorité des cas, sous une gouverne estrogénique causée par une diminution marquée de progestérone. La dominance représente cet écart. Selon ce médecin, cette situation est préjudiciable puisque le rôle principal de la progestérone est celui de veiller sur la nature proliférative de l’estrogène. Pas étonnant que plusieurs symptômes qui accompagnent le déficit en progestérone, soient identiques à ceux engendrés par un excès d’estrogènes. Ceci ne signifie pas que les estrogènes soient de nature dangereuse mais qu’équilibre est synonyme de sécurité! Cycles plus court, saignements abondants accompagnés de caillots, fibrome utérin, syndrome prémenstruel, irritabilité, anxiété, insomnie, douleurs musculosquelettiques et menstruelles, palpitation cardiaque, sensibilité accrue aux seins, constipation, ballonnement, distension abdominale et autres sont des signes qui s’apparent à un besoin accru en progestérone.

L’hyperplasie atypique de l’endomètre est un état précancéreux qui consiste en une prolifération excessive de cellules anormales. S’elle n’est pas traité, les risques de se transformer en cancer de l’utérus augmentent. Avoir des cycles anovulatoires représente un facteur déterminant de cette condition puisqu’il laisse les estrogènes sans opposition. Parmi les options de traitement, on inclut (quelle surprise!) la progestérone. (32)

J’ai mentionné brièvement le rôle protecteur de la progestérone sur le cancer de l’endomètre (utérus). Ce cancer est le plus fréquent parmi les cancers de la sphère gynécologique. Son dépistage en stade précoce en facilite grandement le traitement et assure une rémission dans 95% des cas. Si les causes d’un cancer sont toujours multifactorielles, nous constatons, tout de même, que dans 80% des cas la dominance estrogénique est manifeste. (33) En effet, son incidence est fortement associée à une action estrogénique prolongée sans être neutralisée par la progestérone. Puisqu’un taux élevé de cette dernière fait interférence avec le nombre des récepteurs d’estrogènes et s’oppose conséquemment à la croissance cellulaire induite par les estrogènes, la progestérone représente le principal suppresseur de tumeur de l’endomètre. (33,34) Parmi les autres facteurs de risques, mise à part la prédisposition génétique, nous retrouvons le surpoids, l’hypertension artérielle et l’hyperplasie atypique, soient des conditions sensibles à l’action de la progestérone!

L’équilibre hormonal dans un monde saturé de perturbateurs endocriniens

Il est de plus en plus admis qu’il existe un lien direct entre la qualité environnementale et le bilan hormonal. Certaines molécules, que nous côtoyons tous les jours, ont la capacité d’imiter nos hormones en se fixant à leurs récepteurs spécifiques. Ce phénomène entraine une cascade de désordres métaboliques et des conséquences imprévisibles sur nos cellules et sur notre organisme en entier. Ces substances usurpatrices auxquelles nous sommes exposés portent le nom commun de perturbateurs endocriniens ou xénobiotiques.

Tels que défini par l’Union Européenne en 2002, les perturbateurs endocriniens sont ‘’des substances qui, en interférant avec les fonctions du système hormonal, risquent d’influer négativement sur les processus de synthèse, de sécrétion, de transport, d’action ou d’élimination des hormones’’. Ces molécules sont soupçonnées d’être impliquées dans la majorité des cancers, l’infertilité, les allergies, les maladies auto-immunes, les malformations congénitales, la résistance bactérienne croissante aux antibiotiques et autres (35). Selon la Commission européenne, 99% des plus de 100 000 produits chimiques introduits dans l’environnement aux cours des derniers 70 ans demeurent encore aujourd’hui sous-réglementés et donc difficiles à contrôler. Ces saboteurs endocrinotoxiques sont partout autour de nous; dans l’eau et la nourriture, les plastiques, les peintures, le mobilier, les détergents, les textiles, les médicaments, en plus d’être concentrés dans les produits d’hygiène corporelle et les cosmétiques.

Une grande majorité de ces perturbateurs imite les estrogènes en interagissant avec les récepteurs de cette hormone, ce qui induit à une action directe sur les gènes sensibles aux estrogènes. Seins, endomètre, cerveau, organe génitaux, tissus adipeux et foie représentent, malheureusement, des organes cibles pour ces molécules toxiques. Puisqu’ils sont chimiquement et cliniquement actifs, on comprend à quel point ils peuvent contribuer au déséquilibre hormonal et accentuer la dominance estrogénique. Il y a de quoi être préoccupé! Dans un contexte aussi favorable aux estrogènes, la progestérone représente un incontournable par ses effets protecteurs et grandement essentiels!

La progestérone joue un rôle important à tous les âges de la vie de la femme et ceci demeure une vérité même lors de la ménopause.

Le fait que les récepteurs de progestérone se trouvent bien au-delà des frontières des tissus reproducteurs, nous permet d’envisager l’importante contribution de cette hormone à la santé globale. Hormone de tempérance et de bienveillance, elle contient avec justesse les excès de sa consœur estrogène tout en complétant ses fonctions essentielles. Ce partenariat est indispensable pour atteindre l’équilibre hormonal si convoité. La dominance estrogénique qui caractérise l’instabilité hormonale chez nombre de femmes accentue les facteurs de risques pour maintes conditions, impactant les facultés cognitives, le capital osseux, la santé des seins et le profil cardiovasculaire, pour ne nommer qu’elles. Malheureusement, trop de médecins ont été formés à croire que les progestines synthétiques sont en fait de la progestérone et qu’elles produisent des effets similaires. Cette confusion est nourrie par des quantités de publications qui manquent de rigueur qu’en à la terminologie utilisée. Il est plus que temps de départir l’information afin que la progestérone naturelle s’affranchisse enfin du poids des inconvénients liés, pour la plupart, exclusivement aux progestines synthétiques.

Références:

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Endormir le cancer la nuit

Article paru dans revue Vitalité Québec mars 2021

L’on peut affirmer que jusqu’à présent, les explications pour justifier l’augmentation exponentielle des cas de cancers, particulièrement dans les pays industrialisés, sont peu satisfaisantes. Quelque chose dans le mode de vie occidental moderne semble augmenter les statistiques. Parmi les hypothèses émises, l’exposition à la lumière pendant la nuit, par son action inhibitrice sur la mélatonine, s’impose de plus en plus comme un déterminant majeur (1-3).  Plus de 60 ans se sont écoulés depuis la découverte de cette hormone sécrétée en réponse à l’obscurité. Longtemps, on a cru que la mélatonine n’était qu’une hormone inductrice de sommeil. Toutefois, de nombreuses et récentes études ont redéfini et élargi les rôles de cette hormone, en lui attribuant, par sa fonction régulatrice du cycle circadien, un large spectre d’activités anti-carcinogènes. Je vous invite, dans cet article, à explorer les effets oncostatiques de la mélatonine.

 

Le cycle circadien représente l’horloge interne du corps humain. Il s’agit d’un rythme biologique qui fluctue durant la journée et synchronise le cycle sommeil-veille des individus au cycle de lumière/obscurité de la Terre. Des liens importants existeraient entre la perturbation du rythme circadien et la susceptibilité à développer certaines maladies, dont le cancer, et plus particulièrement le cancer du sein hormonodépendant (4). Cette relation fut remarquée la première fois dans les années 1960 et les recherches depuis ne cesse de confirmer cette relation (5). Conséquemment, la manipulation de l’horloge circadienne, par la mélatonine, semble une voie prometteuse pour freiner le processus tumoral lors d’un cancer du sein.

Modulation hormonale

70% des cancers du sein présentent des récepteurs positifs aux estrogènes. C’est pour cette raison que l’on nomme ce dernier : hormonodépendant. Le rôle prolifératif des estrogènes (principalement l’estradiol) sur le tissu mammaire est connu depuis 1896 (6). Lorsque l’estradiol se fixe sur son récepteur, il active une série de réactions venant affecter le comportement de la cellule dont sa croissance. Ceci signifie que pour ces cellules, l’estrogène représente un partenaire favorable à leur prolifération et survie, d’où l’intérêt des médicaments servant à bloquer la fixation de ces hormones aux récepteurs tels que le tamoxifen et le raloxifène. Si la quantité d’estrogènes circulants est un facteur considérable dans l’évolution de la maladie, le nombre de récepteur l’est tout autant.  Il se trouve que la mélatonine, notre précieuse hormone de sommeil, régule à la baisse le nombre de récepteurs d’estrogènes. Elle serait capable de faire taire les gènes responsables (7-13), en plus d’interférer avec l’activation des récepteurs par les estrogènes. Ceci permettrait de freiner la multiplication cellulaire et les effets mitogènes liés à ces hormones (14). Ces données suggèrent que la mélatonine a une influence importante sur l’expression génétique, particulièrement pour les cellules cancéreuses du sein influencées par le taux d’estrogènes circulant, en plus de neutraliser le caractère invasif de l’estradiol (15).

 

Chez la femme, les estrogènes sont synthétisés principalement dans les ovaires mais aussi dans le tissu adipeux et localement dans le tissu mammaire, ce qui explique pourquoi une femme en ménopause n’est pas, pour autant, protégée de ce type de cancer (16-18). Les estrogènes sont tous créés à partir des hormones androgènes (dites masculines) par une enzyme unique appelée aromatase. À la ménopause et avec la prise de poids qui l’accompagne, l’activité de l’aromatase augmente.  Ceci permet de combler, en partie, le déficit hormonal ovarien et assurer des fonctions physiologiques importantes et dépendantes des estrogènes (cognition, densité osseuse, santé cardiovasculaire, autres).  Malheureusement, les estrogènes peuvent aussi représenter un facteur de risque pour le cancer. Puisque l’aromatase augmente localement la production d’estrogènes, les chercheurs ont découverts que cette enzyme était, effectivement, plus active dans le tissu mammaire malin que non-malin (19-24). Par son action modulatrice hormonale, l’aromatase représente une cible thérapeutique dans le traitement du cancer du sein, ce qui justifie le recours aux inhibiteurs de l’aromatase, tels que Arimidex et Femara (25).

Les estrogènes existent dans le corps sous différentes formes dont l’estrone et l’estradiol.

L’estradiol représente le membre le plus actif parmi les estrogènes et aussi la forme la plus proliférative sur le tissu mammaire. L’estrone, par l’intervention d’une enzyme nommée 17-β-HSD-1, se transforme en estradiol ou peut être stocké sous forme de sulfate d’estrone (26,27). Le sulfate d’estrone représente le meilleur marqueur afin de déterminer si la femme est exposée à un surplus d’estrogènes. Cette forme ne peut agir directement sur les récepteurs, ni les cellules, mais peut être converti à nouveau en estradiol et induire une activité proliférative. Le sulfate d’estrone est effectivement reconverti dans différentes lignées cellulaires de cancer mammaire hormonodépendant mais très peu ou pas dans les lignées cellulaires de cancer mammaire indépendant des hormones (28). Les cellules mammaires cancéreuses ont tendance à accumuler de grandes quantités de sulfate d’estrone. On le dit ‘’fertilisant à libération lente pour les cellules estrogénodépendantes’’. L’enzyme responsable de la conversion du sulfate d’estrone en estradiol se nomme sulfatase stéroïdienne.

 

Puisque l’inhibition de la synthèse de l’estradiol peut avoir un effet positif sur l’évolution du cancer du sein hormonodépendant, le contrôle des activités de l’aromatase, de la 17-β-HSD-1 et de la sulfatase stéroïdienne, qui sont des étapes clés dans la formation d’estradiol, peut ouvrir à de nouvelles possibilités dans le traitement de ce type de cancer (28,29). Ceci est à l’étude depuis quelques années dans la recherche et le développement de produits pharmaceutiques (30). Or, notre chère mélatonine mérite, elle aussi, une attention particulière dans ce dossier ! La mélatonine est reconnue comme inhibitrice de l’expression et de l’activité de plusieurs enzymes impliqués dans le profil hormonal, dont l’aromatase, la 17β-HSD-1 et la sulfatase stéroïdienne (31-35). De plus, la mélatonine agit sur une autre enzyme, la sulfotransférase, responsable d’inactiver l’estradiol (36). Le rôle modulateur enzymatique de la mélatonine représente exactement le profil recherché pour décourager la croissance tumorale, particulièrement dans le cancer du sein hormonodépendant (7).

Parmi les facteurs influençant les activités de l’aromatase, l’insuline figure en tête de liste (37).

En effet, la dent sucrée n’aide en rien le tableau. D’abord, l’insuline représente un facteur de croissance pour le cancer (38) mais aussi parce que tous les excès de glucose seront d’office dirigés vers les tissus adipeux pour y être stockés, là où l’aromatase est manifeste. Qui dit aromatase dit estrogènes. Fait intéressant, les chercheurs ont découvert que l’augmentation des niveaux de mélatonine diminue l’absorption du glucose, inhibe la glycolyse aérobique (une voie particulière de consommation de glucose par la cellule cancéreuse), modifie l’expression des transporteurs de sucre dans les cellules cancéreuses et réduit la capacité des cellules productrices d’insuline à libérer cette hormone. Les taux circulants de facteur de croissance liés à l’insuline diminuent également lorsque la mélatonine est sécrétée ou administrée. Ceci ajoute de multiples bénéfices oncostatiques importants aux bonnes nuits de sommeil (39)! En définitive, si les niveaux de mélatonine sont faibles, l’activité de l’insuline la nuit ne sera pas freinée, l’expression de l’aromatase sera augmentée (40) et la progression tumorale encouragée!

Les multiples modes d’action de la mélatonine au cœur de la cellule en font une excellente candidate pour la prévention du cancer, et particulièrement celui du sein hormonodépendant.

Mélatonine et traitements conventionnels

Le potentiel anticancer de la mélatonine sur les tumeurs mammaires hormonodépendantes repose principalement sur ses actions anti-estrogéniques, à la fois en réduisant la biosynthèse des estrogènes mais aussi en neutralisant les effets cellulaires de ces derniers. Comme nous l’avons vu précédemment, les hormones agissent sur les cellules en se fixant à leurs récepteurs respectifs.

Le tamoxifen est un médicament menant à une inhibition sélective des récepteurs d’estrogènes. Son usage est salutaire afin d’empêcher la fixation de l’estradiol sur les récepteurs hormonaux. Ceci bloque une série de réaction menant à la croissance cellulaire lors d’un cancer hormonodépendant. Il existe 3 types de récepteurs estrogéniques, dont le plus craint est le récepteur alpha, reconnu pour enclencher une forte réponse proliférative. Le tamoxifen vise ce récepteur en particulier, tout comme la mélatonine (41-47)! La mélatonine agit différemment et de façon complémentaire au tamoxifène dans le sens qu’elle ne se fixe pas directement sur les récepteurs ni n’interfère avec la liaison de l’estradiol (48-50), mais se lie à ses propres récepteurs membranaires, et via cette liaison, inhibe l’action des estrogènes sur l’ADN (48,50-54). De plus, il a été démontré que plus il y a de récepteurs à mélatonine sur une cellules hormonodépendantes, meilleure est la réponse de ces cellules aux effets anti-estrogéniques de la mélatonine et du tamoxifène (55,56). La mélatonine serait un régulateur d’intérêt pour limiter la résistance à la thérapie endocrinienne et médicamenteuse (57). Actuellement, entre 30% et 50% des patientes atteintes de tumeur du sein estrogène positif, développent une résistance intrinsèque au tamoxifen, ce qui représente un obstacle majeur au traitement de cette maladie (58). Plusieurs études in vitro ont démontré que la mélatonine pouvait améliorer l’efficacité de cette médication (59-61). La mélatonine semble donc renforcer les effets anticancers du tamoxifène (59), mais aussi en réduire les effets secondaires. Le Tamoxifène est connu pour fragiliser les femmes au cancer utérin. Après que des essais cliniques aient conclues à une réduction de ce risque avec l’ajout d’une forme de mélatonine au tamoxifène, un brevet a été déposé en 2014 pour la création d’un médicament combiné (62).

Mélatonine et horaire de travail

La mélatonine, sécrétée la nuit, exerce des effets profonds sur la physiologie des estrogènes, la progression tumorale et la réceptivité au traitement classique. Puisque cette hormone culmine généralement entre minuit et 2 heures du matin, quel est l’impact sur la santé des travailleurs de nuit ou des noctambules?

‘’La nuit porte conseil’’ mais surtout protection et santé. L’association entre le travail de nuit, ou à horaire rotatif, et le risque accru de différents types de cancer est étayée par de nombreuses études (63-67). En 2007, le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC), une agence spécialisée de l’Organisation Mondial de la Santé, a classé le travail de nuit, qui implique une perturbation circadienne, comme un cancérogène humain probable (groupe 2A) (68). Sur la base de cette classification, le National Board of Industrial Injuries au Danemark a reconnu le cancer du sein comme une maladie professionnelle chez les femmes qui travaillaient de nuit pendant au moins une journée par semaine pendant 20 ans ou plus. Par conséquent, ces femmes, principalement des infirmières et des agents de bord, ont même reçu une compensation économique du gouvernement danois (69). Une méta-analyse réalisée en 2009 par Viswanathan et Schernhammer a conclu qu’il y avait une augmentation globale de 40% du risque relatif de développer un cancer du sein, surtout hormonodépendant, chez les femmes travaillant de nuit (70). En effet, l’augmentation nocturne de la mélatonine plasmatique serait beaucoup plus faible chez les patientes atteintes d’un cancer du sein positif aux estrogènes que chez les femmes en bonne santé (71). Ceci s’explique par une augmentation de la stimulation estrogénique lorsque la mélatonine est interrompue (72-78). Le travail de nuit, trois fois ou plus par mois, augmenterait le risque de développer la maladie. Ce risque serait proportionnel aux nombres d’heures travaillées de nuit durant la semaine (72,75,76,79) et augmenterait chez les femmes ayant commencé des quarts de nuit avant leur première grossesse (80). Un risque plus élevé de cancer du sein survient également chez les femmes ayant un sommeil perturbé qui s’exposent régulièrement à de lumière ambiante la nuit (81) par l’usage d’appareils électroniques, de tablette, la télévision et la lumière bleue. Puisque des niveaux plus élevés de mélatonine urinaire le matin sont associés à une diminution du risque de cancer du sein (82), la perturbation des habitudes de sommeil, et donc de l’horloge biologique interne, influence directement la physiologie et le développement de la maladie lorsque la nuit ne sert pas à dormir profondément.

Conclusion 

En raison de la complexité de la maladie, on ne peut affirmer que la mélatonine traite le cancer, toutefois il est devenu clair que la perturbation de notre horloge interne veille/sommeil est un facteur d’influence à ne pas négliger. Les multiples modes d’action de la mélatonine au coeur de la cellule en font une excellente candidate pour la prévention du cancer et particulièrement celui du sein hormonodépendant. La mélatonine pourrait représenter une stratégie adjuvante innovante par l’addition de ses propriétés oncostatiques à celles d’autres thérapies conventionnelles. La mélatonine favorise la stabilité des gènes, présente un profil d’innocuité élevé et est, de plus, remarquablement bien tolérée! Parlez-en à votre médecin.

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Existe-t-il une relation entre le sucre et le cancer?

Article paru dans la revue Vitalité Québec avril 2020

Reconnue pour améliorer plusieurs paramètres de santé tels que le tour de taille, la tension artérielle, la glycémie, la protection neurologique et l’inflammation, une alimentation réduite en glucides est pour le moins alléchante! Mais pourrait-elle être avantageuse également lors d’un cancer et représenter un complément sécuritaire lors de traitements?

C’est en étudiant les particularités biologiques qui distinguent la cellule cancéreuse de la cellule saine que le rôle de l’alimentation gagne en importance. En effet, le comportement de la cellule tumorale se différencie à multiples égards. Parmi les caractéristiques les plus significatives se trouve une reprogrammation de son métabolisme énergétique. Que cela veut-il dire? Que la cellule cancéreuse ne se nourrit pas à l’image des autres cellules du corps.

En effet, afin de subvenir à son développement accéléré et favoriser sa survie, la cellule cancéreuse n’a d’autre choix que de se gaver insatiablement de carburant.

Il existe seulement 3 types de carburants : le glucose provenant des glucides, les acides gras provenant des lipides et les acides aminés provenant des protéines. Comme toutes les cellules du corps, le substrat énergétique préférentiel de la cellule maligne est le glucose, duquel elle est dépendante. Toutefois, la façon dont elle l’utilise est distinctive; elle ne l’oxyde pas en présence d’oxygène mais le fermente. La fermentation est un processus primitif qui s’enclenche naturellement en situation anaérobique (manque d’oxygène, à l’image des bactéries), cependant, la cellule cancéreuse a développé la capacité de fermentation en présence d’oxygène! Ce qui est unique! Ce phénomène est nommé l’effet Warburg (glycolyse aérobique) et fut observé pour la première fois en 1924. Il nous a fallu être patients et attendre 87 ans avant que la communauté scientifique reconnaisse officiellement (en 2011) cette caractéristique, pourtant majeure, d’autant plus qu’elle s’exprime dans plus de 70% des cancers primaires et 90% des cancers métastasés.1,2

Ainsi, la disponibilité du glucose influencerait la majorité des activités des cellules cancéreuses!

Nous savons également que plus le taux de consommation de sucre est élevé, plus la tumeur gagne en agressivité3. Encore plus significatif, nous savons aussi que ce n’est ni le type ni la localisation des cellules cancéreuses mais la façon dont elles métabolisent le glucose qui déterminerait leur malignité !

L’efficacité avec laquelle la cellule cancéreuse produit son énergie est également particulière. Puisqu’elle utilise principalement la voie de la fermentation, le rendement énergétique est faible. La cellule cancéreuse nécessite entre 16 et 18 fois la quantité de glucose pour produire le même volume d’énergie. Cependant, pour assurer leur approvisionnement soutenu en énergie, les cellules cancéreuses consomment de 10 à 50 fois plus de sucre que les cellules normales et utilisent le glucose presque 100 fois plus rapidement que les cellules saines.4,5 Comment est-ce possible? Afin de rencontrer les exigences d’une prolifération rapide, les cellules malignes régulent à la hausse plusieurs enzymes impliquées dans la dégradation du glucose ainsi que le nombre de transporteurs et récepteurs sensibles à l’insuline à leur surface.6 À titre d’exemple, le nombre de récepteurs à insuline à la surface des cellules cancéreuses du sein est trois fois plus élevé que celui des cellules saines et presque le double pour ce qui est des cellules cancéreuses du côlon.7

L’insuline est une hormone sécrétée par le pancréas. Elle intervient lorsque la glycémie est élevée, suite à un repas riche en glucides, par exemple. Cette hormone facilite le transport du glucose présent dans le sang vers l’intérieur des cellules. Dans une étude publiée en 2013, dans le Journal of Clinical Investigation, les chercheurs ont rapportés que des niveaux élevés de glucose déclenchent l’expression de plusieurs facteurs de croissance8 et activent la prolifération tumorale de 20 à 40%.6 Parmi ces facteurs de croissance nous retrouvons l’un des éléments les plus déterminants dans la progression tumorale, soit le facteur de croissance analogue à l’insuline de type 1 ou IGF-1. C’est par l’intermédiaire de récepteurs à IGF-1, que les cellules malignes réussissent à capter autant de sucre. La collaboration est complète : plus le taux de glucose est élevé, plus l’insuline intervient, plus les facteurs de croissance s’activent et plus la tumeur se développe rapidement.6,9

Non seulement les preuves épidémiologiques recueillies dans plusieurs études ont montré que des taux d’insuline plus élevés peuvent conduire à un développement significatif du cancer sur plusieurs sites (pancréas, l’œsophage, foie, colon, rectum, estomac, prostate, sein) mais, plus inquiétant encore c’est le constat que des taux élevés d’IGF-1 sont associés à un risque accru de mortalité induite par le cancer.10,11,12

La fermentation du glucose apporte une quantité d’autres avantages pour la cellule maligne.

En utilisant cette forme de production d’énergie, les cellules sécrètent parallèlement de l’acide lactique (ou lactate), qui représente le produit final de cette fermentation. Identifié comme toxique, ce déchet acide sera vite déversé hors de la cellule pour se concentrer dans le micro- environnement immédiat.  La concentration de cette acidité servira à endommager les tissus adjacents, activer le développement des voies sanguines d’approvisionnement (angiogenèse), participer à l’adhésion, l’invasion et la métastase tumorale en plus d’induire une immunosuppression.5 Les taux élevés de lactate favorisent directement l’agressivité de la tumeur et la progression de la maladie.5-13 On estime que les cellules tumorales produisent jusqu’à 40 fois plus d’acide lactique que les cellules normales.14

En définitive, une glycémie élevée, une intervention intermittente ou chronique de l’insuline ainsi que la synthèse d’acide lactique qui en résulte représentent des éléments qui exercent des effets très puissants sur le devenir tumoral. Ils créent une tempête parfaite ! En tant que facteur d’influence majeure, ces éléments sont également reconnus pour induire une résistance aux traitements conventionnels (radiothérapie et chimiothérapie).6 Une alimentation faible en glucides représente, à la lumière de ces informations, une stratégie pouvant affecter significativement le cours de cette maladie. Le cancer serait donc sensible à la composition de l’assiette. À nous de lui offrir un menu inhospitalier !

Pour obtenir plus de détails, je vous invite à visionner sur ma chaine Youtube ma conférence La diète cétogène et le cancer offerte en décembre 2022

Références :

  1. Altenberg B, Greulich KO. Genes of glycolysis are ubiquitously overexpressed in 24 cancer classes. Genomics, 2004
  2. Rafael Moreno-Sanchez et al. Energy metabolism in tumor cells. FEBS Journal, 2007
  3. Rainer Wittig et al. The role of glucose metabolism and glucose-associated signalling in cancer. Perspect Medicin Chem, 2007
  4. O. Warburg ‘’On the origin of Cancer Cells’’, Science, vol.123,no 3191, 1956
  5. Susana Romero-Garcia et al. Lactate Contribution to the Tumor Microenvironment: Mechanisms, Effects on Immune Cells and Therapeutic Relevance: Mechanisms, Effects on Immune Cells and Therapeutic Relevance. Frontiers in Immunology, February 2016.
  6. Rainer J Klement, Ulrike Kämmerer. Is there a role for carbohydrate restriction in the treatment and prevention of cancer? Nutrition and Metabolism, 2011
  7. Neil Mckinney, naturopathic oncology: an encyclopedic guide for patients and physicians. 2010
  8. Yasuhito Onodera, Jin-Min Nam, Mina J. Bissell. Increased sugar uptake promotes oncogenesis via EPAC/RAP1 and O-GlcNAc pathways. Journal of clinical investigation, January 2014.
  9. Boyd. DB, Insulin and cancer. Integr Cancer Ther. 2003 Dec;2(4):315-29.
  10. Emily J Gallager et al. Minireview: IGF, insulin and cancer. Endocrinology, 2011
  11. Yakar, S. et al. The role of the growth hormone/insulin-like growth factor axis in tumor growth and progression: lessons from animal models. Cytokine Growth Factor Rev, 2005
  12. Krone CA, Ely JT: Controlling hyperglycemia as an adjunct to cancer therapy. Integr Cancer Ther 2005
  13. Walenta S et al. High lactate levels predict likelihood of metastases, tumor recurrence, and restricted patient survival in human cervical cancers. Cancer Res 2000
  14. Holm E et al. Substrate balances across colonic carcinomas in humans. Cancer Res 1995

Jeûne et cancer : le pouvoir et la force thérapeutique de « rien »

Article paru dans la revue Vitalité Québec septembre 2020

Le jeûne est présenté depuis toujours comme l’un des moyens les plus innés et les plus sûrs que possède le corps pour rétablir une bonne santé. Dans la prévention des maladies, le jeûne est devenu un sujet populaire, en particulier dans le domaine de l’oncologie. Et si le meilleur médicament résidait dans une approche nutritionnelle intégrative où le jeûne, jumelé aux traitements conventionnels, permettaient d’optimiser au maximum les résultats ? Cette question, plusieurs chercheurs l’ont explorée et parmi ceux-ci, le Dr. Valter Longo de l’Université de Californie du sud. Dans un communiqué de presse, il affirme : « Il se peut qu’en étant toujours exposés à tant de nourriture, nous ne profitons plus des systèmes de protection naturels qui permettent au corps de tuer les cellules cancéreuses (…) Mais en suivant un régime réduit en calorie comme le jeûne, vous pouvez laisser le corps utiliser des mécanismes sophistiqués capables d’identifier et de détruire les cellules mauvaises mais pas bonnes de manière naturelle. » (1)

Que se passe-t-il dans le corps lorsque celui-ci est confronté au jeûne?

C’est au spécialiste japonais de biologie cellulaire, Yoshinori Ohsumi que nous devons les explications du processus cellulaire nommé autophagie, pour lequel il obtint le prix Nobel de Médecine et de Physiologie en 2016. En situation de stress, comme lors de carence en nutriments, l’autophagie représente un mécanisme naturel de régulation. Il consiste en la dégradation partielle du contenu de la cellule par la cellule elle-même. C’est une forme de nettoyage et/ou de recyclage des déchets ou des éléments non-essentiels pour combler les besoins immédiats des cellules. L’autophagie est indispensable pour maintenir le bon fonctionnement de l’organisme puisqu’elle permet de transformer les structures endommagées en molécules utilisables pour le métabolisme. En présence de cancer ou d’infection, la cellule peut, de la même manière, éliminer ses constituants défectueux ou potentiellement toxiques, voire s’autodétruire, afin de protéger l’organisme entier.

 

Bien qu’une autophagie réduite puisse permettre la formation d’une tumeur et sa survie à court terme, les cellules cancéreuses présenteraient généralement une capacité autophagique inférieure aux cellules saines. En effet, plusieurs études soulignent comment le manque d’autophagie conduit à des niveaux plus faibles de gènes suppresseurs de tumeurs. Parmi les avantages anticancer du processus autophagique, nous retrouvons une meilleure stabilité dans l’expression génétique, une réduction de la capacité de prolifération cellulaire et une nette diminution de l’inflammation requise pour le développement tumoral. L’autophagie est, de plus, reconnue pour amplifier la mort cellulaire induite par les traitements de radiothérapie et de chimiothérapie (2). Des avantages non négligeables! Le jeûne pourrait, ainsi, représenter une façon potentiellement nouvelle de concevoir des stratégies de traitement anticancer plus efficaces.

Amélioration de la qualité de vie pendant la chimiothérapie

Dans une étude populaire, menée aux USA, près d’une quarantaine de personnes ont jeûné en combinaison avec une chimiothérapie et ont rapporté que le jeûne était non seulement possible, mais réduisait un large éventail d’effets secondaires, y compris les nausées. Mais là ne s’arrêtent pas la liste des bénéfices. En effet, le jeûne améliorerait également la tolérance générale au traitement, la fatigue, les maux de tête, les vomissements, la diarrhée et les crampes lorsque ce dernier est combiné avec la chimiothérapie par rapport à la chimiothérapie seule (3,4).

 

Parmi les effets délétères de la chimiothérapie, la déplétion des cellules sanguines représente le facteur qui retarde le plus fréquemment les cycles de chimiothérapie, laissant la personne plus fragile aux infections opportunistes. Le jeûne semble offrir une solution intéressante sur ce point. En effet, le jeûne protègerait les globules rouges et blancs des effets néfastes lors de traitement, assurant une protection immunitaire supplémentaire dont un compte de neutrophiles supérieur (5), permettant le maintien du traitement.

Lors d’un cancer, quels sont les autres bénéfices qui découlent du jeûne?

La cellule tumorale présente des caractéristiques qui lui sont propres, ce qui la distinguent des cellules saines ou dites normales. Parmi ses particularités, elle exprime une modification significative de son métabolisme énergétique, ce qui lui attribue une dent sucrée. En effet, en absence de glucose, la cellule tumorale peine à se développer et maintenir sa viabilité. Le jeûne, sous toute ses formes, enclenche une réduction des niveaux de glucose et améliore la sensibilité à l’insuline. Une meilleure sensibilité à l’insuline rend plus difficile le développement des cellules cancéreuses. Pour rappel, cela se traduit par une baisse d’activité du facteur de croissance nommé l’IGF-1, soit une hormone associée à la prolifération cellulaire dans la majorité des cancers (6). Pendant un jeûne, nos cellules trouvent des moyens d’économiser sur des activités qui nécessitent normalement beaucoup d’énergie, comme la croissance et la prolifération cellulaire.  Le jeûne représente ici une proposition alimentaire stratégique afin de limiter le devenir tumoral.

 

Parce que le jeûne favorise le changement le plus radical dans la disponibilité des nutriments, dont le glucose et les facteurs de croissance qui en dépendent, il a le potentiel de maximiser la sensibilité des cellules cancéreuses aux effets toxiques de la chimiothérapie (7-8), ce qui limite par le fait même le phénomène de résistance aux traitements qui est, malheureusement, une réalité courante. Lors du jeûne, la chute des nutriments permet la mise en place d’un mode de protection cellulaire nommé résistance aux contraintes différentielles (traduction libre de Differential Stress Resistance ou DSR)(4). Cette manœuvre permet aux cellules saines de se protéger contre les effets toxiques de la chimiothérapie comparativement aux cellules cancéreuses, incapables d’élaborer cette stratégie. L’amélioration de l’efficacité d’une variété d’agents chimiothérapeutiques fut constatée sur de multiple lignées cellulaires malignes exprimées dans le cancer du sein, le mélanome, le neuroblastome, le cancer du pancréas et le cancer colorectal (8-9). De plus, il a été démontré que le jeûne potentialise également le rendement thérapeutique des inhibiteurs de la tyrosine kinase qui représentent la nouvelle ère de traitement d’immunothérapie (10).

 

Le jeûne, ou une restriction calorique importante (abaissement de l’apport calorique allant de 30 à 70%), entraine également des effets puissants sur le système immunitaire. L’équipe du Dr. Longo a démontré que parmi ceux-ci, on note une hausse favorable du niveau de cellules lymphocytes T, lymphocytes B et des cellules tueuses naturelles, dont le rôle est d’infiltrer la tumeur pour la détruire. Le régime à jeun a provoqué, de surcroit, l’expulsion d’un autre type de cellules immunitaires, appelées cellules T-régulatrices, du site tumoral. Les cellules T-régulatrices sont connues pour protéger les cellules cancéreuses d’une agression immunitaire. En effet, les scientifiques ont découvert qu’une telle approche alimentaire affaiblit une enzyme appelée hème oxygénase, ou HO-1, à l’intérieur des cellules T-régulatrices et rend les médicaments de chimiothérapie plus efficaces pour assaillir les cellules malignes (11).

Selon Dr. Longo, le jeûne et la restriction calorique représentent des moyens peu coûteux de rendre un large éventail de cellules cancéreuses plus vulnérables à une attaque par les cellules immunitaires, tout en rendant le cancer plus sensible à la chimiothérapie (1).

Puisque le jeûne entraîne une diminution des facteurs de croissance circulants, il force la cellule à réduire ses activités au détriment de sa prolifération. Ainsi un ensemble d’oncogènes et de stratégies favorables à la maladie se retrouvent affectés négativement (RAS, MAPK, PI3K-AKT, Hif-1) (8-9). Ces derniers sous-tendent plusieurs caractéristiques tumorales essentielles dont la croissance, la multiplication cellulaire, l’évasion de l’apoptose et l’angiogenèse (12). La restriction calorique est également capable de moduler le microenvironnement tumoral, en réduisant l’inflammation et conséquemment la fatigue qui en résulte. Mais encore, le jeûne améliore la fonctionnalité d’une protéine essentielle à la saine réplication des cellules et dans la destruction des cellules malignes, soit la p53. Cette protéine est sujette à des mutations venant inhiber son pouvoir protecteur et anticancer dans la grande majorité des cellules tumorales, toutefois, le jeûne permettrait de renverser cette inhibition (13).

 

Quels sont les formes de jeûne reconnues sécuritaires?

Parmi les différentes formes de jeûne, celle qui attire le plus d’adepte est le jeûne intermittent. Il se définit par une fenêtre sans apport de nourriture d’une durée de 16 heures. Il est de loin le plus accessible et applicable au quotidien. Il suffit de retarder le premier repas de la journée et éviter toute prise alimentaire pendant au moins 3-4 heures avant le coucher. La plage horaire classique est de prendre sa dernière bouchée à 18h00 et mâcher sa première bouchée le lendemain à 10h00. Cette approche semble apporter des bénéfices tangibles lors de cancer sensibles aux hormones (3,14) comme celui du sein, des ovaires et de la prostate.

Cependant, pour atteindre le maximum de bénéfices, induire une autophagie et réduire significativement le glucose sanguin, un jeûne prolongé demeure la meilleure option (15). Selon les études (animales et humaines) l’acte de jeûner sur une période de 72 heures, débutant la veille d’un traitement de chimiothérapie, le maintenir le jour même et le poursuivre jusqu’au lendemain du traitement apporterait les plus grands avantages. Ceci dit, il est possible de maintenir la consommation d’eau ou de bouillons si vos inconforts sont importants.

Quels sont les effets secondaires et les risques associés à une telle pratique?

Contrairement à la plupart des thérapies utilisées contre le cancer, le jeûne ne provoque que des inconforts légers, tels que faiblesse passagère, vertiges et perte de poids à court terme chez l’humain (4). L’ensemble des gens composant avec cette maladie ne représente pas tous des candidats pour l’application du jeûne pour autant. Les personnes ayant déjà subi une perte de poids sévère, ceux qui souffre de sarcopénie avancée, de cachexie ou de malnutrition importante induite par une anorexie médicamenteuse ou de multiples foyers lésionnels dans les voies digestives devraient s’abstenir d’initier une telle démarche.

En définitive, la plupart des tumeurs sont générées et évoluent dans un environnement riche en nutriments, pourtant la thérapie actuelle n’inclut pas de changements alimentaires pouvant créer un environnement hostile pour les cellules cancéreuses. En tant qu’intervention non pharmacologique pour améliorer la santé et augmenter la qualité de vie, le jeûne et la restriction calorique représentent, preuves abondantes et convaincantes à l’appui, un tremplin encourageant pour développer de futures stratégies dans le traitement de cette maladie. Bien que le jeûne et la restriction calorique soient des interventions prometteuses pour une grande variété de tumeurs, il est toujours sage d’en parler auprès de votre équipe de soin pour évaluer votre condition générale au préalable.

Références :

  1. Fasting-Like Diet May Naturally Fight Cancer and Boost Chemotherapy’s Effectiveness. Immuno-oncology News, 2016
  2. Fernanda AntunesAdolfo Garcia Erustes et al. Autophagy and intermittent fasting: the connection for cancer therapy? Clinics (Sao Paulo). 2018
  3. Stephan P. Bauersfeld , Christian S. Kessler et al. The effects of short-term fasting on quality of life and tolerance to chemotherapy in patients with breast and ovarian cancer: a randomized cross-over pilot study. Bauersfeld et al. BMC Cancer, 2018
  4. Stefanie de GrootHanno PijlJacobus J. M. van der HoevenJudith R. Kroep. Effects of short-term fasting on cancer treatment. Journal of Experimental & Clinical Cancer Research
  5. Cheng CW, Adams GB, Perin L, et al. Prolonged fasting reduces IGF-1/PKA to promote hematopoietic-stem-cell-based regeneration and reverse immunosuppression. Cell Stem Cell. 201
  6. Bourbeau Véronique. Existe-t-il une relation entre le sucre et le cancer? Vitalité Québec, avril 2020
  7. Raffaghello L, Safdie F, Bianchi G, Dorff T, Fontana L, Longo VD. Fasting and differential chemotherapy protection in patients. Cell Cycle 2010
  8. Lee C, Raffaghello L, Brandhorst S, Safdie FM, et al. Fasting cycles retard growth of tumors and sensitize a range of cancer cell types to chemotherapy. Science Translational Medicine 2012
  9. Raffaghello L, Lee C, Safdie FM, Wei M, et al. Starvation-dependent differential stress resistance protects normal but not cancer cells against high-dose chemotherapy. Proc Natl Acad Sci U S A. 2008
  10. Irene Caffa1, Vito D’Agostino et al. Fasting potentiates the anticancer activity of tyrosine kinase inhibitors by strengthening MAPK signaling inhibition. Oncotarget, Vol. 6, No. 14
  11. Stefano Di BiaseChanghan Lee, Sebastian Brandhorst et al. Fasting mimicking diet reduces HO-1 to promote T cell-mediated tumor cytotoxicity. Cancer Cell. 2016
  12. Kalamian, Keto for cancer, ketogenic metabolic therapy as a targeted nutritional strategy. Ed Chelsea Green, 2017, p.90
  13. David Berrigan,Susan N. Perkins, Diana C. Haines, Stephen D. Hursting. Adult-onset calorie restriction and fasting delay spontaneous tumorigenesis in p53-deficient mice. Carcinogenesis, Volume 23, Issue 5, May 2002, Pages 817–822
  14. Catherine R. Marinac, BA, Sandahl H. Nelson, MS, Caitlin I. Breen et al. Prolonged Nightly Fasting and Breast Cancer Prognosis. JAMA Oncol. 2016 Aug 1; 2(8): 1049–1055.
  15. Thissen JP, Ketelslegers JM, Underwood LE. Nutritional regulation of the insulin-like growth factors. Endocr Rev. 1994

Nourrir son microbiote pour garder le sourire !

Article paru dans la revue Vitalité Québec, édition été 2020

Tout le monde connaît des épisodes de fluctuations émotionnelles; toutefois, les personnes atteintes de troubles de l’humeur les éprouvent avec plus d’intensité et sur de plus longues périodes que la plupart des gens. Une chose sur laquelle la communauté médicale peut convenir est que les neurotransmetteurs ont une influence majeure sur le comportement et les troubles de santé mentale et que cette tendance serait liée, pour une grande partie, à une prédisposition génétique. En dépit des améliorations apportées au diagnostic et la variété des traitements offerts, près du quart des utilisateurs jugerait ces derniers inadéquats et insatisfaisants1. La tendance croissante des afflictions mentales à travers le monde indique un besoin urgent d’innovation afin d’adresser la santé mentale sous un nouvel angle.

Le microbiote intestinal est la collection de micro-organismes, principalement des bactéries, qui résident dans le tractus gastro-intestinal de l’hôte humain.

On estime que ces microbes sont plus nombreux que les cellules humaines3 et expriment cent fois plus de gènes que leur hôte humain4 d’où l’intérêt grandissant de leur participation dans l’état de santé.

Il existe une relation bidirectionnelle entre l’intestin et la fonction cérébrale (c’est-à-dire l’axe microbiote-intestin-cerveau). Les données accumulées indiquent que le microbiote intestinal communique avec le système nerveux central par diverses voies, notamment via le nerf vague, le système immunitaire et les voies endocrines. Les études sur les humains et les animaux fournissent de plus en plus de preuves suggérant un lien étroit entre la composition du microbiote intestinal et le développement de troubles mentaux tels que la dépression et l’anxiété5-6.

Les communautés microbiennes se développent essentiellement au cours des premières années de la vie et demeurent relativement résistantes au changement. Cependant, il est reconnu que des facteurs tels que la prise d’antibiotiques, la composition du régime alimentaire, les fluctuations glycémiques et l’exposition au stress provoquent des altérations significatives du microbiote et peuvent favoriser les troubles neuropsychologiques.

La nutrition et le bonheur:

Au cœur de l’intestin se trouve un système nerveux dit entérique. Les neurones appartenant à cet organe participent, conjointement au microbiote, à l’équilibre et la régulation de nos neurotransmetteurs. En effet, l’intestin produit une large gamme d’hormones et environ 40 types de neurotransmetteurs identiques à ceux présents dans le cerveau. Parmi les neurotransmetteurs issus généreusement de l’intestin nous retrouvons la sérotonine, la dopamine et le GABA7. Ensembles, ils régulent l’humeur, le sommeil, l’appétit et interviennent dans la prévention de la dépression et de l’anxiété.

La sérotonine est essentielle pour l’épanouissement et le bien-être en général et les gens l’associent souvent à une attitude positive.

La recherche a lié un faible taux de sérotonine à des troubles de l’humeur, et semble tenir un rôle important dans la dépression. Il est estimé qu’environ 90 à 95% de la sérotonine utilisée par l’organisme est produite dans l’intestin.

Le tryptophane est un acide aminé indispensable à la production de sérotonine. Il est essentiel au fonctionnement du cerveau et permet un sommeil réparateur. Le tryptophane se retrouve dans les aliments, contrairement à la sérotonine. Puisque l’organisme n’est pas capable de le fabriquer, il doit absolument provenir de l’assiette. Parmi les sources alimentaires les plus riches en tryptophane nous retrouvons la dinde, les œufs, le saumon et l’avoine.

Le microbiote intestinal régule à la fois la voie métabolique du tryptophane7, en plus d’assurer l’absorption de la vitamine B6 et du magnésium, issus du régime alimentaire. Ces éléments représentent des cofacteurs intervenant dans la synthèse de l’ensemble des neurotransmetteurs, dont la sérotonine. Par ailleurs, la concentration de vitamine B6 dans le cerveau est environ 100 fois plus élevée qu’au niveau sanguin, il n’est donc pas surprenant que la carence en cette vitamine entraine des conséquences neuropsychologiques. Les meilleures sources de B6 sont les pois chiches, le foie de bœuf de pâturage, le thon à queue jaune, le saumon sockeye, la volaille, la pomme de terre et la banane.

La dopamine, pour sa part, est impliquée dans les processus de motivation et de récompense. Elle participe à l’attention, la mémoire et au sentiment de dépendance.

Lorsque la dopamine est libérée en grande quantité, elle crée une vague de plaisir et d’enthousiasme. Environ 50% de la dopamine utilisée par l’organisme est produite par les neurones entériques, avec la contribution du microbiote, à partir de la phénylalanine et la tyrosine. Des études montrent que l’augmentation de la quantité de tyrosine et de phénylalanine dans l’alimentation augmente les niveaux de dopamine dans le cerveau alors qu’à l’inverse, lorsque ces acides aminés sont peu consommés ou peu absorbés les niveaux de dopamine s’amenuisent8. Ces deux acides aminés se trouvent naturellement dans les aliments riches en protéines comme la dinde, le bœuf, les œufs, les produits laitiers et les légumineuses.

Le GABA est une autre substance importante produite par la flore intestinale. Il tient le rôle de neurotransmetteur inhibiteur. En d’autres termes il calme l’esprit et nous donne accès à la zénitude. En modifiant ainsi l’activité neuronale, le GABA contrôle le sentiment de panique, la détresse psychologique, l’hostilité et l’anxiété. Il nous permet de mieux gérer le stress et diriger notre attention. Une équipe de recherche a publié dans le Journal of Applied Microbiology que certains types de bactéries intestinales assuraient la production de ce neurotransmetteur, soient les lactobacillus et les bifidobactérium à partir de la glutamine9. Les meilleures sources alimentaires de cet acide aminé sont le bouillon de poulet, la viande de pâturage, les fruits de mer, les œufs, les produits laitiers, le chou et les noix.

Le sucre et le bonheur

Bien que le principal carburant pour le cerveau soit le glucose, ceci ne signifie pas qu’il faille en manger exagérément afin d’améliorer la performance mentale pour autant ! Bien connue pour sa tendance à augmenter la sensation de bien-être à très court terme, la dent sucrée contribuerait plutôt à la dépression, l’anxiété, l’irritabilité, la confusion, les excès de colère et la fatigue. En effet, les afflux de sucre dans la circulation sanguine ont de multiples effets néfastes sur le cerveau et le microbiote en entrainant une carence importante en neurotransmetteurs, notamment en sérotonine, dopamine et GABA. Les substances requises pour produire ces neurotransmetteurs, comme les vitamines B et le magnésium s’épuisent également10.

Les fluctuations glycémiques induites par la consommation régulière en sucre perturbent le comportement en plus de favoriser un phénomène que l’on nomme dysbiose. La dysbiose s’oppose en quelque sorte à la symbiose. La symbiose signifie un état harmonieux et un partenariat avantageux entre les germes de l’intestin et les cellules humaines alors que la dysbiose se réfère à un état de déséquilibre dans la biodiversité microbienne (en qualité et/ou quantité). Dans une telle condition, les microorganismes opportunistes (appelées pathobiontes), normalement peu nombreux et secondaires, deviennent dominants alors que les bactéries bénéfiques se font plus rares. Ce remaniement de l’intestin interviendrait dans l’apparition et la sévérité de certaines pathologies, dont la dépression. En effet, certaines bactéries néfastes consommeraient le précieux tryptophane dans le but de se reproduire au détriment de la synthèse de la sérotonine11. Comme quoi une dysglycémie entraine des carences en sous-produits issus des bactéries intestinales, essentiels à la santé nerveuse12.

Des preuves récentes ont démontré que les saines bactéries de l’intestins produisent également une substance nommée BDNF, soit le facteur neurotrophique dérivé du cerveau. Cette molécule est une protéine essentielle pour la croissance cérébrale. Elle est impliquée dans la protection des cellules nerveuses existantes mais aussi dans la neurogenèse, soit le processus de formation de nouveaux neurones. Or, des taux réduits en BDNF sont observés dans une multitude de conditions neuropsychologiques telles que la dépression, l’anxiété et les troubles obsessifs-compulsifs. Vous l’aurez deviné, les fonctions du BDNF sont affectées par un débalancement de la glycémie d’où l’importance de nourrir adéquatement son microbiote.

Afin de préserver le fonctionnement du cerveau, la régulation de la glycémie est la priorité. Pour se faire, il est suggéré de limiter la consommation de glucides pauvres en fibres, d’optimiser les sources de protéines dont les légumineuses et prioriser les bons gras. Ne pas abuser des fruits, maintenir une régularité dans l’horaire des repas et collations, limiter la consommation de stimulant comme le café, ne sauter aucun repas et miser sur l’activité physique. D’ailleurs, l’une des façons non-alimentaire d’augmenter la synthèse de BDNF est justement par la pratique régulière d’un sport!

Le stress et l’intestin

En cette période d’incertitude globale, de distanciation sociale et de confinement à domicile, le stress engendré par les inquiétudes (économiques, sanitaires, relationnelles, autres) est une composante de la vie quotidienne pour une grande partie de la population.

Le cortisol est la principale hormone de réponse au stress et nous aide à réagir dans les situations d’alertes. Toutefois, l’excès de cortisol entraine une modification dans la composition des colonies intestinales, rendant l‘individu plus susceptible de présenter des troubles de l’humeur13-14-15. C’est bien connu, il existe un cercle vicieux dans lequel le stress et l’anxiété s’influencent mutuellement.

Le stress peut perturber le microbiote intestinal en faveur d’une dysbiose et les microorganismes pathogènes peuvent affecter, en retour, le comportement de l’hôte. Notre réponse au stress serait, là aussi, déterminée par nos bactéries intestinales. Lorsque l’intestin est recolonisé avec des bactéries intestinales saines, cela conduit à une inversion de la réponse exagérée liée aux hormones de stress. Certaines souches de probiotiques se sont avéré favorables à ce retour au calme dont le bifidobacterium infantis et le lactobacillus rhamnosus.

La manipulation des colonies de bactéries intestinales, par l’ajout de probiotiques, permettrait d’améliorer la gestion de stress. Un probiotique est un microorganisme vivant (bactérie ou levure) partenaire de l’intestin qui a un effet bénéfique en améliorant l’équilibre global du microbiote. Le bifidobacterium infantis apporte différents avantages. Il est impliqué d’abord dans la synthèse du tryptophane16 requis pour la fabrication de sérotonine, le neurotransmetteur du bien-être. En plus, cette souche bactérienne normaliserait la réponse physiologique au stress sans exagération et permettrait un retour aux normes plus rapidement. Pour sa part, le lactobacillus rhamnosus a démontré avoir un effet amplificateur sur les niveaux de GABA et réducteur sur les niveaux de cortisol induits par le stress se traduisant par une diminution de l’anxiété et des comportements dépressifs17.

Bien que la majorité des études sont effectuée sur des modèles animaux, les résultats sont hautement prometteurs pour le genre humain. Plus on découvre l’ampleur de la participation du microbiote sur la santé neuropsychologique, plus il devient important de prioriser son équilibre. Les probiotiques représentent, dans ce contexte, un élément bienfaisant.

L’accumulation de preuves suggère que l’alimentation et le mode de vie jouent un rôle essentiel dans le maintien et l’amélioration de la fonction cérébrale via la modulation du microbiote intestinal. Puisqu’un intestin non fonctionnel se reflète dans un cerveau non fonctionnel, une approche cohérente des troubles mentaux requiert une évaluation globale. La nutrition ne représente pas ici une approche alternative mais bien une démarche fondamentale.

Références :

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2020 : l’année de la vitamine D

Article paru dans la revue Vitalité Québec novembre/décembre 2020

Au cours des dernières décennies, plusieurs études ont démontré qu’une carence en vitamine D représentait un facteur de risque pour diverses maladies dont l’ostéoporose et la dépression saisonnière1,2. Plus récemment, les chercheurs ont découvert une autre facette majeure de cette vitamine : son action modulatrice sur le système immunitaire. Si la contribution de la vitamine D à la santé est mieux détaillée et comprise aujourd’hui, cette proposition ne date pourtant pas d’hier. Jadis, l’arrivée de la saison froide rimait avec le retour de l’iconique cuillère d’huile de foie de morue bien savoureuse! Bien avant l’utilisation des antibiotiques, cette potion préventive des infections hivernales circulait dans nos familles mais aussi dans les sanatoriums de l’époque où l’on soignait la tuberculose et la consomption avec cette huile riche en vitamine D3,4.

Depuis, des études épidémiologiques ont démontré de fortes associations entre les variations saisonnières des taux de vitamine D et l’incidence de diverses maladies infectieuses, dont les infections respiratoires et la grippe5,6.

Chez les personnes ayant une carence documentée en vitamine D, la réponse immunitaire serait affaiblie ou anormale, les rendant d’office plus susceptibles d’être victime des flambées épidémiques saisonnières et développer un degré accru de symptômes respiratoires graves

Le rôle premier du système immunitaire est d’assurer l’intégrité de l’organisme. Il travaille à éliminer les substances perçues comme étrangères (micro-organismes, cellules anormales, débris) tout en assurant la tolérance des différentes structures appartenant à l’individu. Une substance étrangère se nomme un antigène.

Les défenses de l’organisme sont structurées autour de deux voies : l’immunité innée et l’immunité adaptative. L’immunité innée représente la première ligne de défense contre les antigènes. Elle se compose des barrières naturelles (la peau, les muqueuses et leurs microbiotes, les sécrétions tissulaires telles que la salive, la sueur, le sébum, l’acide chlorhydrique de l’estomac), de mécanismes inflammatoires (fièvre, cytokines), de production de substances antimicrobiennes et de fonctions de nettoyage (phagocytose). La réponse innée est identique, quel que soit la nature de l’antigène et prend place lorsque ce dernier demeure à l’extérieur des cellules de l’hôte. L’immunité adaptative intervient en second plan, lorsque l’antigène pénètre à l’intérieur de nos cellules. Elle entraine une réponse spécifique à ce dernier via la création d’anticorps. Un anticorps est une protéine spéciale dotée du mandat de neutraliser les antigènes. Une fois produit, l’anticorps demeure en mémoire dans notre organisme, nous appelons cela l’immunisation. C’est le principe de base visé par l’acte vaccinal.

La vitamine D et l’immunité

La vitamine D se présente sous 2 différentes formes : inactive et active (aussi nommée calcitriol). Récemment, nous avons découvert que les reins ne seraient pas les seuls organes activateurs mais que les cellules immunitaires représentaient également des joueurs importants. Afin de renforcer leurs actions, les cellules immunitaires auraient la capacité, sur le site même de l’infection, de convertir les précurseurs de la vitamine D sous leur forme biologiquement active10,11. Une fois activée localement, le calcitriol se lie à son récepteur (retrouvé également dans ces mêmes cellules immunitaires) et déclenche une cascade d’événements issus à la fois de l’immunité innée et adaptative dont l’augmentation des sécrétions antimicrobiennes, la production de protéines antivirales, l’activation des cellules éliminatrices, la création et la libération d’anticorps, la modulation de la réponse inflammatoire (ni trop ni moins) et la réparation des tissus lésés. Ceci témoigne de l’importance de la vitamine D afin d’assurer une défense immunitaire énergique.

Lors d’infection virale, c’est l’exubérance de la réponse immunitaire de l’hôte, plutôt que le pathogène lui-même, qui détermine la gravité clinique et le risque de mortalité associés aux maladies telles que la grippe12,13 et la COVID-1914. L’infection par le SRAS-CoV-2 (virus responsable de la COVID-19) induit un fort dysfonctionnement du système immunitaire caractérisé par le développement d’une réponse inflammatoire intense chez l’hôte et la mise en place d’une condition potentiellement mortelle définie comme le syndrome de libération des cytokines inflammatoires (SRC). La dérégulation des réponses protectrices du système immunitaire ainsi que l’induction d’activités inefficaces dans différents types de cellules immunitaires peuvent mener au syndrome respiratoire aigu (SDRA), principalement chez les personnes âgées15,16.

Parmi les fonctions utiles de la vitamine D se trouvent celles de réduire la perméabilité pulmonaire aux envahisseurs17, la modulation à la baisse de facteurs inflammatoires nocifs (dont certaines cytokines) pouvant causé un rétrécissement des bronchioles, le renforcement musculaire (dont les muscles intercostaux sollicités lors d’infections respiratoires)18, l’amélioration du volume maximal d’air expiré (traduisant la capacité pulmonaire)19, l’induction de la mort des cellules infectées (apoptose) et la synthèse de radicaux libres visant à déstabiliser l’intrus20.

Avec un taux optimal de vitamine D, les mécanismes de défense sont nettement améliorés, la gravité de l’infection est atténuée, la convalescence écourtée et la qualité de vie favorisée!

Ces avantages amènent plusieurs chercheurs à considérer l’utilisation de la vitamine D comme un adjuvant stratégique aux autres thérapeutiques utilisées actuellement21. Au cours de la première vague de COVID-19, une corrélation inverse entre les concentrations sanguines de vitamine D et la sévérité de la maladie est d’ailleurs ressortie comme significative dans plus de 20 pays22-26.

Des données épidémiologiques montrent que les sujets âgés, ou chroniquement malades, ont un risque plus élevé de décès suite à une infection par le SRAS-CoV-2, par rapport aux individus plus jeunes ou en meilleure santé. En fait, ces personnes présentent un affaiblissement chronique de la réponse immunitaire induit par des dysfonctionnements qualitatifs / quantitatifs des différents intervenants issus à la fois de l’immunité innée et adaptative. Ceci se traduit par un déséquilibre en faveur des cytokines pro-inflammatoires (IL-1α, IL-2, IL-6, IL-8, IL-12, IFN-γ) rapport aux anti-inflammatoires (IL-1 Ra, IL-4, IL-10, TGF-β)27, ce qui fragilise constamment leur condition immunitaire.  Ce phénomène est amplifié au contact du SRAS-CoV2 et peut mener à une tempête cytokinique. Cette dernière prend place à la fois dans le sang et dans les poumons des personnes infectées. La tempête cytokinique est la forme la plus sévère du syndrome de libération de cytokine mentionné plus haut. Plus la tempête est forte, plus la maladie est alarmante et les lésions pulmonaires préocupantes28,29.

Par conséquent, la régulation de la réponse inflammatoire exagérée observée au cours de l’infection par le SRAS-CoV-2 représente un élément clé dans la stratégie pour contrer le virus et prévenir ses effets potentiellement mortels. Or, une carence en vitamine D est associée à des niveaux plus élevés de cytokines pro-inflammatoires suggérant qu’un statut adéquat de cette vitamine pourrait contribuer à limiter leur synthèse et donc atténuer le sérieux de l’infection virale30-35. La vitamine D exerce également une action réparatrice des tissus alvéolaires pulmonaires (avec la contribution de la vitamine A)36. Puisque qu’environ 20% des personnes atteintes de la COVID-19 développent une pneumonie interstitielle accompagnée de lésions sévères, l’ajout de la vitamine D à l’arsenal thérapeutique classique semble, jusqu’à ce jour, favorable37.

Les dernières années ont initié un changement radical dans notre perspective sur la façon dont la vitamine D influence la santé. Les répercussions d’une carence en vitamine D sur le système immunitaire (inné et adaptatif) sont devenues plus claires. Dans une telle situation, il semble y avoir une susceptibilité accrue aux infections et une prédisposition à la flambée inflammatoire toxique. Plusieurs études appuient l’hypothèse selon laquelle la suffisance en vitamine D contribue à des fonctions immuno-régulatrices et une réponse immunitaire équilibrée, particulièrement dans un contexte d’infection respiratoire d’origine virale. En ces temps de pandémie, l‘état des connaissances actuelles sur la vitamine D nous permet de croire que son statut sanguin représente l’un des facteurs influençant notre combativité face à la maladie.

Références :

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Articles consultés:

Jamais sans mon cholestérol!

Article paru dans la revue Vitalité Québec octobre 2020

Depuis les 50 dernières années, s’il y a une substance pour laquelle nous avons tous été forcé de croire qu’elle était néfaste c’est bien le cholestérol. Sans ignorer la complexité du sujet et sans entrer dans la controverse entourant sa médication, la lutte acharnée contre le cholestérol n’a pas fini de faire débat. Clamant l’innocence de cette molécule mais surtout son utilité physiologique, les opposants de la propagande anticholestérol se font de plus en plus nombreux. Alors, saint ou vilain? Afin d’y voir plus claire, il est plus que souvent pertinent de revenir aux sciences fondamentales (aux notions de base). Réexaminons donc ensemble ce qu’est le cholestérol.

Le cholestérol n’est pas un sujet banal. Depuis sa découverte en 1794, il bouscula littéralement le monde de la science en raflant 13 prix Nobel à lui-seul. Ceci est bien plus que le domaine extraordinaire de la génétique! 1

Produit à 80% par le foie, sa synthèse requiert 36 étapes successives et la participation de multiples enzymes et cofacteurs! Sa fabrication est l’une des plus lente de tout l’organisme et est régulée en fonction de nos besoins. Les cellules ne le synthétisent pas sans raison valable, ceci témoigne de sa grande utilité!

Le cholestérol alimentaire (celui que l’on ingère à partir de l’assiette) affecte peu la cholestérolémie (le taux de cholestérol dans le sang), cependant, la consommation de sucre, d’huile raffinée et de produits transformés s’y reflète proportionnellement. Le cholestérol est autorégulé : lorsque l’alimentation en apporte peu, nos cellules en produisent davantage.

Bien qu’il ne représente qu’à peine 2% du poids corporel, le cerveau concentre 25% de tout le cholestérol et représente le plus grand organe consommateur, suivi du système nerveux, des glandes surrénales et des organes reproducteurs. Ceci nous indique que le cholestérol tient, pour ces organes, un rôle fondamental et qu’une baisse importante de sa concentration influencera de toute évidence leurs activités respectives.

La performance d’un organe dépend de la qualité de ses cellules et essentiellement de la qualité de ses membranes. Or, le cholestérol est un élément constitutif majeur des membranes de toutes les cellules du corps! Il occupe environ 30% de leur surface. Il confère à ces dernières des propriétés essentielles à leur viabilité. Toutes les cellules du corps ont besoin de communiquer entre elles. Pour se faire, elles utilisent des protéines réceptrices logées dans leurs membranes. Ces protéines y sont attachées par des molécules de cholestérol et ce complexe se nomme radeaux lipidiques. C’est donc en grande partie par la présence de cholestérol que les cellules répondent adéquatement aux hormones et aux neurotransmetteurs, permettant ainsi d’équilibrer l’humeur, d’aiguiser la mémoire et soutenir l’attention.

Lors d’une baisse en quantité ou en qualité structurelle des radeaux lipidiques, on dénote une altération majeure dans les fonctions intellectuelles et endocriniennes et une progression de complications neurologiques et psychiatriques pouvant entraver la qualité de vie des individus.1

Le cholestérol et le cerveau :

Différentes études au cours des dernières décennies établissent un lien inquiétant entre un cholestérol bas et certaines conditions neurologiques dont la dépression, l’anxiété, l’agressivité, la paranoïa, le suicide, les troubles du sommeil, la maladie d’Alzheimer et le Parkinson. En effet, le taux de dépression serait de 3 à 4 fois plus élevé et le suicide 5 fois plus fréquent chez les personnes ayant une hypocholestérolémie (soit 150mg/dl et moins) 1,2,3,4,5,6,7. Plusieurs études ont montré que de faibles taux de cholestérol sont associés à des niveaux de sérotonine (neurotransmetteur du bonheur) constamment faibles chez les patients suicidaires et déprimés 8,9. L’hypothèse est émis que l’hypocholestérolémie conduirait indirectement à une diminution de la sérotonine cérébrale en raison de l’exigence d’un taux de cholestérol adéquat dans les membranes des cellules nerveuses afin de maintenir l’intégrité des récepteurs de la sérotonine 8,10.

Selon une autre étude menée sur 7.9 ans, des niveaux plus élevés de cholestérol total et même de « mauvais » cholestérol (LDL) seraient associés à une diminution du risque de la maladie de Parkinson chez les hommes11.

Ces résultats ont d’ailleurs été présentés au Congrès international sur la maladie de Parkinson et les troubles du mouvement qui s’est tenu à Vancouver en 2017.

Les cellules nerveuses sont, de plus, recouvertes d’une gaine de protection nommée myéline (très semblable à la gaine isolante qui enveloppe un fil électrique) qui elle-même est constituée de 20% de cholestérol. Cette gaine permet à l’influx nerveux de circuler rapidement et efficacement. Elle régule ainsi la vitesse de traitement des informations nécessaires aux fonctions intellectuelles. Lorsque la gaine est lésée, la fibre nerveuse sous-jacente peut mourir et entrainer des dommages permanents. Le ralentissement cognitif et moteur qui s’amplifient avec le vieillissement est une indication que la myéline s’effrite, en quelque sorte. Des chercheurs ont étudié le rôle du cholestérol comme facteur de protection contre les maladies neurodégénératives telles que la sclérose en plaques, la sclérose latérale amyotrophique et l’Alzheimer12 et les résultats convergent positivement.

Chacune des cellules nerveuses communique avec les autres par l’intermédiaire de jonctions appelées synapses. Ce sont par les synapses que les neurotransmetteurs circulent dans le corps et influencent nos aptitudes mentales et notre comportement. Des perturbations dans les synapses sont impliquées dans de multiples processus neurologiques tels que l’humeur, l’apprentissage, la mémoire et la motricité. Les synapses comprennent des membranes, vous l’aurez deviné, constituées de cholestérol! En fait, la formation des milliards de synapses du système nerveux est presqu’exclusivement dépendante du cholestérol produit par les cellules du cerveau13,14. En définitive, une baisse de cholestérol se reflètera, une fois de plus, dans les performances nerveuses de l’individu.

Comme nous pouvons le constater, le cholestérol est un élément indispensable à la santé du cerveau et du système nerveux, il n’est pas surprenant que des déficiences dans le métabolisme du cholestérol soient à l’origine de conditions neurologiques importantes.

Le cholestérol et l’équilibre hormonal :

Indispensable à la reproduction de l’espèce, le cholestérol est le point de départ de plusieurs hormones dont la progestérone, la testostérone, les estrogènes, le cortisol (gestion de stress), la vitamine D et l’aldostérone (pression sanguine). On serait d’emblée porté à présumer qu’une réduction de cholestérol impacterait négativement la synthèse de ces hormones, pourtant, tel n’est pas le cas. Cependant, comme nous l’avons vu, le cholestérol influence le nombre et la fonctionnalité des récepteurs membranaires (radeaux lipidiques) essentiels à la captation de ces hormones! Une chute du cholestérol affectera négativement le nombre des récepteurs, ce qui induira une diminution de l’utilisation des hormones mentionnées! Une hypocholestérolémie contribue par ce fait, à une possible déficience hormonale!

Cholestérol et digestion :

Le cholestérol est à l’origine des cinq acides biliaires, molécules indispensables à la digestion des lipides… dont la digestion du cholestérol lui-même ! Eh oui, maigre quantité de cholestérol et capacité réduite à digérer les gras vont de pair! En effet, le cholestérol est l’un des éléments les plus importants de la bile. Sans bile, il nous devient alors impossible d’émulsifier et absorber dans l’intestin, non seulement les molécules grasses provenant de notre assiette mais aussi une catégorie de vitamines dites liposolubles dont la précieuse vitamine D.

Cholestérol et vitamine D :

La vitamine D est connue pour apporter de la robustesse aux os et réduire les risques d’ostéoporose, mais ses bienfaits ne se limitent pas qu’au squelette, loin de là! En effet, la vitamine D occupe une fonction protectrice en cas de maladies auto-immunes comme le psoriasis, l’arthrite rhumatoïde, la maladie inflammatoire de l’intestin15, le lupus16, la sclérose en plaque 17 et ce constat est bel et bien confirmé par des données épidémiologiques. La vitamine D participe également à la défense immunitaire lors d’infections respiratoires18, 19, 20 (grippe, pneumonie) et diminue l’incidence des maladies cardiovasculaires en s’opposant à la calcification et le durcissement des vaisseaux sanguins21,22. De plus en plus de données abondent sur le rôle préventif de la vitamine D et l’incidence de certains cancers23,24 (colorectal25,26,27,28, seins29, prostate30, poumons31). La vitamine D contrôle également une quantité importante de gènes impliqués dans la sécrétion de l’insuline et dans le développement du diabète32,23. Un lien entre le déclin cognitif 33,34,35, la maladie d’Alzheimer36 et l’appauvrissement en vitamine D est cité de plus en fréquemment depuis les 10 dernières années. Puisque la synthèse de la vitamine D ne s’entrevoit pas sans cholestérol, on ne peut que constater l’ampleur de sa contribution pour notre santé dans sa globalité. Pas banal le cholestérol, non?   Alors que la plupart d’entre nous ont été informés des dangers de l’hypercholestérolémie et des moyens de l’éviter, il existerait cependant un seuil critique à ne pas franchir où une faible concentration en cholestérol deviendrait préjudiciable à la santé. Le cholestérol mérite qu’on le réexamine sous un autre angle, celui de son utilité et qu’on l’affranchisse de son caractère hautement nocif nourri depuis les 50 dernières années. À la lumière des fonctions essentielles que rempli cette précieuse molécule, lui faire la guerre à tout prix revient, en quelque sorte, à se faire violence à soi-même. Références:  
  1. La vérité sur le cholestérol, Philippe Evens, Ed Cherche midi, 2013
  2. Hypocholesterolemia is an independent risk factor for depression disorder and suicide attempt in Northern Mexican population. Marcela Segoviano-MendozaManuel Cárdenas-de la Cruz et al. BMC Psychiatry. 2018; 18: 7.
  3. Serum lipid concentrations in patients with major depressive disorder. S O OlusiA A Fido. Biol Psychiatry, 1996 Dec 1;40(11):1128-31.
  4. Lower serum high-density lipoprotein cholesterol (HDL-C) in major depression and in depressed men with serious suicidal attempts: relationship with immune-inflammatory markers. M MaesR SmithA ChristopheE Vandoolaeghe et al. Acta Psychiatr Scand, 1997 Mar;95(3):212-21.
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  6. Changes in plasma cholesterol in mood disorder patients: does treatment make a difference? A Gabriel.J Affect Disord, 2007 Apr;99(1-3):273-8.
  7. Lowering cholesterol concentrations and mortality: a quantitative review of primary prevention trials. M F MuldoonS B ManuckK A Matthews. BMJ. 1990 Aug 11;301(6747):309-14.
  8. Low serum cholesterol concentration and serotonin metabolism in men.P. H. SteegmansD. FekkesA. W. Hoes et al. BMJ. 1996 Jan 27; 312(7025): 221.
  9. Low blood cholesterol and low platelet serotonin levels in violent suicide attempters. J C Alvarez D CremniterP LesieurA GregoireA Gilton et al. Biol Psychiatry, 1999 Apr 15;45(8):1066-9.
  10. Cholesterol and serotonin indices in depressed and suicidal patients. M Sarchiapone1G CamardeseA RoyS Della Casa et al. J Affect Disord, 2001 Feb;62(3):217-9.
  11. Higher serum cholesterol and decreased Parkinson’s disease risk: A statin‐free cohort study. Violetta Rozani MA, Tanya Gurevich MD, Nir Giladi MDet al. Movement Disorders, 25 August 2018
  12. Traiter la maladie d’Alzheimer à la source. Pauline Gravel, Cahier santé du journal Le Devoir,14 mai 2007
  13. CNS synaptogenesis promoted by glia-derived cholesterol. D H MauchK NäglerS Schumacher et al. Science, 2001 Nov 9;294(5545):1354-7.
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